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– Revue de presse N° 21

 

– 21 janvier 2025 – { 2003–2025 } – 22ème année }

https://www.assemblee–nationale.fr/dyn/17/textes/l17b0788_proposition–resolution#

Proposition de résolution, n° 788

17e législature

Proposition de résolution, visant à la convocation d’une Assemblée constituante chargée de rédiger la Constitution de la Sixième République, n° 788, déposée le mardi 21 janvier 2025.

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https://www.letemps.ch/societe/egalite/le–haut–conseil–a–l–egalite–francais–releve–une–polarisation–croissante–entre–femmes–et–hommes

Hors sujet

Le Haut Conseil à l’Egalité français relève une «polarisation» croissante entre femmes et hommes

Publié le 20 janvier 2025 à 15:12.

Le Haut Conseil à l’Egalité (HCE) constate une «polarisation» croissante entre des femmes «plus féministes» et des hommes parfois sensibles à des discours jugés «masculinistes», en particulier dans la jeunesse, dans son rapport annuel sur l’état du sexisme en France publié lundi.

Six Français sur 10 estiment qu’il est difficile d’être une femme. C’est le cas de 86% des femmes de 25 à 34 ans et de 66% des jeunes hommes, selon un baromètre réalisé en octobre 2024 auprès d’un échantillon représentatif de 3200 Français de 15 ans et plus. 45% des hommes de moins de 35 ans – et un quart des Français – jugent qu’il est difficile d’être un homme, une idée qui progresse chez les jeunes hommes, selon ce baromètre sur le sexisme, réalisé chaque année par le HCE.

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ENCORE UN BIDULE

Non réélue : son complice macron la nomme présidente du HCE par copinage

«Les femmes sont plus féministes et les hommes plus masculinistes, surtout les jeunes», affirme Bérangère Couillard, présidente du HCE, à l’AFP. Aux Etats–Unis, 45% des jeunes hommes ont voté pour le républicain Donald Trump à l’élection présidentielle, quand 72% des jeunes femmes ont soutenu la démocrate Kamala Harris, relève–t–elle.

Neuf Français sur dix favorable à un programme de prévention à l’école

Pour autant, le procès des viols de Mazan, où 51 hommes ont été condamnés pour des viols sur Gisèle Pelicot, droguée par son mari, a aidé à une «prise de conscience», selon le HCE: pour 65% des Français, cette affaire illustre le fait que «tous les hommes portent une part de responsabilité» en matière de violences sexistes et sexuelles. De plus, environ 9 Français sur 10 «considèrent que les hommes ont un rôle à jouer dans la prévention et la lutte contre le sexisme».

Le baromètre montre que les femmes sont confrontées au quotidien au sexisme: 86% d’entre elles ont déjà vécu une situation sexiste et neuf sur dix ont adopté des stratégies d’évitement du sexisme au quotidien. Les inégalités de traitement entre les hommes et les femmes sont citées dans le monde du travail (76%), dans la rue et les transports (71%) dans le monde politique (70%), dans la vie de famille (62%), dans les médias (48%).

Alors qu’une commission parlementaire publie mardi un rapport sur l’inscription du consentement dans la définition du viol, 35% des femmes indiquent avoir eu un rapport sexuel sans en avoir envie, devant l’insistance du partenaire. Trois quarts des Français jugent importants la prévention et la lutte contre le sexisme. 9 sur 10 sont favorables à un programme à l’école pour comprendre la sexualité et prévenir les violences de genre, que le HCE recommande de mettre en place. Il préconise aussi de développer des «budgets sensibles au genre», pour analyser au niveau national, régional, communal, ce qui est dépensé pour les garçons et les hommes d’une part, pour les filles et les femmes d’autre part et «ajuster les politiques publiques».

https://www.lexpress.fr/politique/exclusif–bruno–retailleau–sur–lalgerie–puisque–la–maniere–douce–na–pas–suffi–NEWZAC66GNBL3HXBSBVEDRXBBI/

Bruno Retailleau : "Rien ne donne à l’Algérie le droit d'offenser la France"

Laureline Dupont, Etienne Girard

Publié le 21/01/2025 à 17:00, mis à jour le 22/01/2025 à 09:12

Boualem Sansal, écrivain franco–algérien, est toujours détenu arbitrairement en Algérie et un influenceur algérien proférant des menaces de meurtre réside encore en France malgré la tentative d’expulsion des autorités françaises. Ces deux faits résument à eux seuls la tension qui s’intensifie depuis plusieurs semaines entre les deux pays. Mais il s’agit bien là d’une crise à répétition, "une crise perlée", selon les mots de Bruno Retailleau, et la récente reconnaissance française de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental ne constitue qu’un énième rebondissement.

Dans le grand entretien qu’il accorde à L’Express, le ministre de l’Intérieur relève les efforts d’Emmanuel Macron qui "a tendu la main à l’Algérie pour réconcilier les mémoires" mais regrette le peu de considération reçu en retour. "Puisque la manière douce n’a pas suffi, il me semble que nous devons à présent examiner l’ensemble des moyens à notre disposition pour remettre la relation sur de bons rails", prévient le locataire de Beauvau qui révèle n’avoir "aucun interlocuteur institutionnel en Algérie". Au–delà de la fin des accords de 1968, il égrène des mesures individuelles, visant, notamment, des dignitaires algériens. Il plaide également pour un meilleur contrôle des entrées sur notre territoire et interroge le rôle d’associations comme la Cimade, financées par l’Etat alors "qu’elles luttent contre la politique que souhaite le peuple français". Il formule une proposition choc : "Je souhaite que demain, et cela devra passer par une disposition législative, l’Etat reprenne la main sur certaines délégations de service public, par exemple en ce qui concerne les conseils juridiques aux migrants."

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Décidé à afficher sa fermeté, le ministre défend aussi l’assimilation, plus exigeante que l’intégration. Car, à ses yeux, à la détérioration des liens diplomatiques avec l’Algérie s’ajoute une "dimension plus abstraite, une sorte de blessure" : la fierté française écorchée.

L’Express : Avez–vous connaissance de liens avérés entre le régime algérien et les influenceurs lancés dans une campagne de haine contre la France ?

Bruno Retailleau : Non, à ce stade nous n’avons aucune preuve qu’il s’agisse d’une manœuvre coordonnée. Nous pouvons en revanche considérer que ces "influenceurs" profitent vraisemblablement d’un contexte d’exacerbation des tensions entre la France et l’Algérie. C’est aussi à cause de ces tensions que nous assistons à une lutte interne et sur le sol français – ce que je n’accepte pas – entre des opposants au régime algérien et des soutiens de ce régime.

“Que chacun se le tienne pour dit : nous ne transigeons pas quand des propos violents sont tenus”

Mais ces derniers ont franchi la ligne rouge. Il est absolument inadmissible qu’un individu, quelle que soit sa nationalité, profère des menaces de meurtre, de viol, des menaces antisémites. Je ne laisserai rien passer. Internet n’est pas une zone de non–droit. A chaque fois que nous avons eu connaissance de ces franchissements de lignes rouges, nous avons saisi la plateforme Pharos [NDLR : un site gouvernemental de signalement de contenus illicites], qui a très vite supprimé les vidéos.

Nous avons également signalé ces agissements à l’autorité judiciaire. Nous avons ensuite localisé les individus pour les interpeller systématiquement. Que chacun se le tienne pour dit : nous ne transigeons pas quand des propos violents sont tenus. La violence physique est toujours précédée par la violence verbale.

Le pouvoir algérien prétend que le dossier d’expulsion du territoire français de l’influenceur Doualemn était incomplet. Qu’en est–il ?

C’est absolument faux. D’ailleurs, les policiers algériens n’ont pas usé de cet argument, mais nous ont indiqué qu’il était "interdit de territoire". Que les choses soient claires : accepter un étranger sur le sol national est un acte de souveraineté. Quand le pays d’accueil refuse à un étranger le droit de rester sur son territoire, la règle internationale impose que ce ressortissant soit accueilli dans son pays d’origine. Là, il n’y avait aucun doute, aucune hésitation, puisque le droit international, la Convention de Chicago, mais aussi le droit que nous nous sommes donné, l’Algérie et nous, avec le protocole signé par nos deux pays en 1994, ne supportent aucune espèce de zone grise. L’Algérie devait accueillir son ressortissant, puisqu’il était muni d’un passeport biométrique en cours de validité.

Est–ce qu’en amont de ce moment à l’aéroport, vous vous étiez assuré que l’Algérie était disposée à reprendre son ressortissant ?

Ce n’est pas le droit, ce n’est pas la règle issue des accords de 1994 entre nos deux pays. Lorsque, comme dans le cas présent, nous expulsons des individus identifiés et disposant d’un passeport, le pays d’origine est informé de façon systématique via les listes de passagers. Aucun laissez–passer consulaire n’est, dans ce type de cas, nécessaire, puisque la nationalité de l’individu est certaine. La seule et unique règle, qui ne vaut pas seulement pour l’Algérie, pas seulement pour la France, est que le pays d’origine doit accueillir son ressortissant. Un point c’est tout. L’Algérie n’a respecté ni le droit international, ni notre protocole bilatéral de 1994.

Vous avez insisté à plusieurs reprises sur le fait que la France accorde des visas à l’Algérie tandis que cette dernière refuse de donner des laissez–passer consulaires (LPC). Quels sont les outils dont vous disposez pour sortir de cette impasse et en finir avec le sentiment d’impuissance publique que cela renvoie ?

Sur le sujet des laissez–passer consulaires, l’Algérie, malheureusement, ne se singularise pas par rapport à̀ d’autres pays. Les obligations de quitter le territoire français (OQTF) dépendent, pour leur exécution, du bon vouloir des pays d’origine, dès lors qu’un LPC est nécessaire, c’est–à–dire dès lors qu’il ne dispose pas de passeport (on dit, dans le jargon, qu’il n’est pas "documenté"). Bien sûr que la proportion de LPC accordés par l’Algérie est trop faible, mais pas plus faible que dans d’autres pays du Maghreb. L’Algérie délivre, semaine après semaine, des laissez–passer et continue d’en délivrer.

“Je pense que nous sommes trop généreux. La France est le pays d’Europe qui accorde le plus de visas”

Mais on voit bien l’extrême difficulté qui entoure le sujet des sorties et des éloignements du territoire français. En résumé, les engagements que nous prenons pour éloigner un individu de notre sol ne dépendent pas de nous mais du pays d’origine. Donc si nous voulons reprendre la main sur l’immigration, comme nous le demande le peuple français, nous devons traiter en priorité la question des entrées dans notre pays. Car les entrées, plus largement que les sorties, dépendent de nous.

Je pense que nous sommes trop généreux. La France est le pays d’Europe qui accorde le plus de visas : plus de 25 % des visas délivrés par les pays européens. Cela représente 2,4 millions de visas en 2024 tandis que l’Allemagne en a accordé 1,5 million. L’histoire particulière et les liens que la France a avec les pays du Maghreb ne suffisent pas à justifier ces chiffres.

La Cimade – avec d’autres associations humanitaires d’aide – est un acteur clé de la politique migratoire française puisqu’elle se voit déléguer des missions d’aide ou d’accueil des migrants. Qu’en pensez–vous ?

Une partie des associations se sont dévoyées. Qu’une association ait un agenda politique, veuille promouvoir une politique d’accueil massif de l’immigration, c’est son choix. Ce qui est choquant, c’est quand ces associations profitent des financements de l’Etat pour promouvoir d’autres politiques publiques que celles que l’Etat veut défendre. Il y a un problème parce que certaines de ces structures se voient confier des missions de service public, et les exercent sans la moindre neutralité. Quand la Cimade organise des "Charters Awards" en classant les préfets et en les livrant à la vindicte, ce n’est pas acceptable. Certaines de ces associations conseillent même aux migrants de ne pas se rendre aux rendez–vous consulaires pour bloquer leur identification.

Je souhaite que demain, et cela devra passer par une disposition législative, l’Etat reprenne la main sur certaines délégations de service public, par exemple en ce qui concerne les conseils juridiques aux migrants. Je ne vois pas pourquoi l’Etat financerait des associations qui luttent contre la politique que souhaite le peuple français.

Revenons à l’Algérie : notre histoire peut–elle justifier à elle seule que nos relations diplomatiques soient aussi asymétriques ?

Je comprends très bien que la guerre d’indépendance soit un événement fondateur de l’Algérie moderne. Je comprends que l’Algérie célèbre cet événement. Je respecte les souverainetés, je respecte les Etats et je respecte les peuples. Mais en contrepartie, j’attends que la France soit aussi respectée. Aucune douleur de l’Histoire ne peut donner à quiconque, y compris à l’Algérie, un droit d’offenser la France. Depuis des années, le président de la République a tendu la main à l’Algérie pour réconcilier les mémoires. Force est de constater que les efforts de la France n’ont pas reçu en retour beaucoup de considération.

“A mesure que nous tendons la main, l’Algérie se montre de plus en plus agressive. Il faut désormais changer d’approche”

Nous vivons à présent une crise provoquée par la reconnaissance française de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Mais la crise a commencé en réalité bien avant. C’est une crise perlée. Lorsque le président a parlé de "rente mémorielle", l’ambassadeur algérien en France a été rappelé. Nos avions militaires qui opéraient au Sahel ont été interdits de survol dans l’espace aérien algérien. Puis, au début de l’année 2023, l’opposante Amira Bouraoui se réfugie en France. De nouveau, l’ambassadeur est rappelé. A mesure que nous tendons la main, l’Algérie (ou du moins ceux qui veulent miner notre relation bilatérale) se montre de plus en plus agressive. Il faut désormais changer d’approche. Le peuple algérien est un grand peuple. Le peuple français aussi. Beaucoup de Français se sentent blessés. Les choses ne peuvent pas demeurer ainsi.

L’arrestation puis le maintien en détention de l’écrivain Boualem Sansal a beaucoup choqué en France. Que pouvez–vous faire à Beauvau pour l’aider ?

Boualem Sansal est une personne âgée, malade, arrêtée injustement, et détenue scandaleusement par le régime algérien. C’est inadmissible. C’est l’un de nos compatriotes. Il n’y a pas une journée sans que je pense à lui. C’est un ami, mais surtout un grand écrivain français. Pas une semaine ne s’écoule sans que j’essaie d’agir à mon niveau mais ces moyens–là, je ne veux pas les révéler. Dans ce type d’affaire, l’efficacité commande la discrétion.

Je pense qu’il faut que nous sortions d’un face–à–face Algérie–France. Je me réjouis que, sous l’impulsion de François–Xavier Bellamy notamment et plus largement du PPE [NDLR : le Parti populaire européen, coalition de partis de droite au Parlement européen], une résolution soit bientôt discutée et sans doute votée au Parlement européen, afin de mettre en garde la Commission sur la négociation d’un accord très important comportant de nombreux aspects commerciaux et d’aide concernant l’Algérie. Et cette résolution va indiquer à la Commission qu’on ne peut pas négocier un tel accord quand un pays ne respecte pas le droit international ou enferme un écrivain français.

Il n’y a plus d’ambassadeur algérien en France depuis la fin du mois de juillet. Quels sont aujourd’hui vos interlocuteurs ?

Institutionnellement, je n’en ai pas. L’ambassadeur a été rappelé mais il y a un chargé d’affaires qui traite de la relation avec la France. Je n’interviens pas dans cette relation et je sais que Jean–Noël Barrot est très mobilisé sur le sujet. Les administrations, évidemment, dialoguent puisque nous n’avons pas cessé de demander des LPC et d’expulser des individus de nationalité algérienne. Mais, en tant que ministre de l’Intérieur, je n’ai pas de relation avec mon homologue algérien.

La DGSI a–t–elle toujours des liens avec son homologue en Algérie ou la transmission d’informations et de renseignements est–elle interrompue ?

Vous comprendrez que je ne peux pas répondre à votre question sur la DGSI. Mais entre les années noires en Algérie, qui ont conduit les services algériens à recueillir un certain nombre d’informations sur des individus, et les actes terroristes en France, une sorte de mutualisation avait vu le jour, un dialogue fructueux s’était noué entre nos pays. Je souhaite que nos deux pays puissent retrouver une relation saine pour ne pas perdre ce dialogue.

Depuis 2015, la France s’est réarmée et nous obtenons des résultats sur le terrorisme. En 2024, il y a eu neuf tentatives d’attentats, toutes ont été déjouées. Aucun mort. Nous n’avons jamais eu autant de tentatives d’attentats, nous n’avons jamais eu aussi peu de victimes. Mais tout cela est fragile et il est évidemment nécessaire de continuer à œuvrer ensemble contre la menace du terrorisme islamiste. La France en a besoin, et l’Algérie aussi.

Etes–vous optimiste sur notre capacité à retrouver avec l’Algérie une relation durablement apaisée ?

Je crois qu’il nous faut désormais normaliser notre relation diplomatique avec l’Algérie. La normaliser, c’est–à–dire la dépassionner. Et faire en sorte qu’on entre enfin dans une relation d’égal à égal, sans arrière–pensée, dépourvue de cette idée d’un droit de tirage perpétuel sur la mémoire pour reprocher à la France les événements passés. La génération actuelle ne peut plus comprendre. Le moment est venu de tourner la page. En objectivant les faits, en construisant des liens apaisés, c’est–à–dire réciproques.

Dans une relation internationale entre deux pays, c’est la règle de la réciprocité qui l’emporte. Puisque la manière douce n’a pas suffi, il me semble que nous devons à présent examiner l’ensemble des moyens à notre disposition pour remettre la relation sur de bons rails.

Le gouvernement actuel a–t–il la légitimité suffisante pour prendre des mesures juridiques importantes, comme la fin de l’accord franco–algérien de 1968 que vous réclamez, la fin de celui permettant aux dignitaires algériens de voyager en France sans visa ou l’accord de Sécurité sociale facilitant les soins des Algériens en France ?

Les accords de 1968 [NDLR : relatifs aux conditions d’entrée en France des ressortissants algériens] me paraissent datés et déséquilibrés. En tant que ministre de l’Intérieur, je considère qu’ils ont déformé l’immigration algérienne dans un sens qui est celui d’une immigration familiale, de peuplement, et non plus de travail. Je souhaite donc que ces accords soient revus et j’ai à ce sujet une position constante puisque j’avais déposé une résolution au Sénat, en 2019. Une grande partie de la classe politique, de droite et du centre, est désormais favorable à cette révision. Je m’en réjouis.

“Les Français vivent cela comme une agression et une blessure profonde est en train de s’installer”

En outre, pour rééquilibrer cette relation, il existe des mesures d’ordre général, vous les avez citées et j’y suis favorable, mais il peut y avoir aussi des mesures individuelles visant des dignitaires algériens, notamment, qui veulent mettre à mal nos relations bilatérales. Des mesures qui peuvent par exemple être patrimoniales, ce qui relève de Bercy, ou concerner la délivrance de visas à des personnes privilégiées qui en même temps nous critiquent publiquement.

Nous sommes sous la Ve République : les relations diplomatiques sont du domaine du chef de l’Etat, élu au suffrage universel. Emmanuel Macron tient sa légitimité de l’élection de 2022. Notre rôle, notre mission, c’est de lui indiquer les outils dont nous disposons pour répondre. Ensuite, il faudra faire un choix. Nous n’avons pas souhaité ce moment de tension, il nous est imposé. Et je veux insister sur le fait que cette tension a deux dimensions. Une dimension internationale, qui concerne la relation diplomatique entre nos deux pays. Et une dimension plus abstraite, humaine, une sorte de blessure… C’est la fierté française qu’on écorche. Les Français vivent cela comme une agression et une blessure profonde est en train de s’installer. Cela n’est bon pour personne.

Le sentiment anti–français prend–il de l’ampleur y compris ici, selon vous ? Comment renouer avec la jeune génération française d’origine algérienne qui exprime parfois plus de rancune à l’encontre de la France que ses aînés ?

J’observe que depuis 2023, le fameux couplet anti–français est à nouveau d’actualité dans l’hymne national algérien. J’observe que depuis 2023, on fait la guerre à l’enseignement de la langue française à l’école primaire au profit de l’anglais…

Il y a deux leviers pour normaliser la relation. Le premier consiste à diminuer le flux migratoire. En cette matière, tout est affaire de proportion : le Premier ministre l’a parfaitement dit dans sa déclaration de politique générale. Aujourd’hui, on voit bien que quand on ne parvient pas à intégrer, cela renforce le processus de "dés–intégration". Les Français qui sont querelleurs, divisés, s’accordent, y compris les électeurs de gauche, pour nous demander de reprendre le contrôle de la politique migratoire. 70 % d’entre eux veulent que l’on mette un coup d’arrêt à l’immigration incontrôlée.

“On n’intègre pas une valeur, on n’intègre pas l’égalité homme–femme, on n’intègre pas la liberté de conscience, on n’intègre pas la fraternité. On assimile ces valeurs”

Le second levier, c’est l’intégration et même l’assimilation. Pour la réussir, nous devons cesser de présenter notre histoire de façon lacrymale et pénitentielle. A force de dire que la France n’est pas aimable, pas estimable, qu’elle est coupable de tout, on ne propose pas un exemple mais un contre–exemple ! La France ne s’aime pas suffisamment pour se poser en modèle. On fait tout pour que des jeunes générations qui sont sur le chemin de la dissidence continuent dans cette voie et ne s’agrègent pas à notre destin national. J’ai retenu cette phrase de Camus : "Il est dangereux de demander à une nation de s’avouer seule coupable et de la vouer à la pénitence perpétuelle." Voilà où nous en sommes. Nous avons proposé un récit culpabilisant, la repentance, qui a fini par atteindre cette fierté française. Il nous faut reconstruire cette fierté française. Les Français l’exigent et la France le mérite.

Nous devons retrouver un regard équilibré sur la période coloniale. La colonisation, c’est bien sûr des pages sombres qu’il faut dénoncer, et nous l’avons fait. Il y a eu aussi, je le dis, des apports et des liens qui se sont créés.

A cela s’ajoute également l’épineuse question de l’articulation de l’islam avec notre laïcité…

Bien sûr. La France est, de tous les pays d’Europe, celui qui a l’immigration la plus concentrée venant d’Afrique, du Maghreb et du Sahel, des zones géographiques arabo–musulmanes énormément travaillées par un islam qui s’est radicalisé, et même, un islamisme. Le danger est de transférer sur le sol national ces problématiques. Notre laïcité est mise à l’épreuve par une partie de l’islam politique qui vit une période de radicalisation à l’échelle planétaire.

Pourquoi préférez–vous le mot d’assimilation à celui d’intégration ?

Un certain nombre de nouveaux venus refusent toute intégration. Alors que, je le répète, l’hospitalité exige une réciprocité. Ce n’est pas aux Français d’adapter leurs mœurs. Ce n’est pas à nous de changer de conception de la laïcité, c’est à eux de s’adapter.

Je vois bien aussi que le mot d’assimilation est plus exigeant que le mot d’intégration. Mais je parle d’assimilation parce que c’est une promesse, avec des contraintes bien sûr. La République est une et indivisible. Nos valeurs sont indivisibles. On n’intègre pas une valeur, on n’intègre pas l’égalité homme–femme, on n’intègre pas la liberté de conscience, on n’intègre pas la fraternité. On assimile ces valeurs. Il faut être précis sur les termes. Effectivement, c’est plus contraignant. Le terme d’assimilation figure d’ailleurs toujours dans notre Code civil.

Selon Le Point, l’Algérie a octroyé un monopole sur la certification halal à la Grande Mosquée de Paris. Toutes les entreprises qui importent des produits halal en Algérie doivent lui verser une taxe. Cette disposition est–elle conforme à la laïcité française ?

Le sujet ne touche pas aux règles de la laïcité, mais aux règles commerciales. Il n’est pas de mon ressort de vérifier la conformité de cette pratique à des règles qui ne relèvent pas de ma compétence. Cependant, nous regardons l’impact que ce système peut avoir sur le financement du culte musulman. La transparence doit être totale, tout comme elle doit l’être sur les produits proposés aux Français. Aujourd’hui, faute d’indications claires sur les produits certifiés, on peut consommer du halal sans le savoir, et donc financer le culte musulman sans le savoir. J’ai toujours été favorable à une réglementation pour plus de transparence sur le sujet.

Dans un entretien qu’il accorde à L’Opinion, le recteur de la Grande Mosquée de Paris vous reproche de ne pas l’avoir reçu : que lui répondez–vous ?

Depuis que je suis arrivé à Beauvau, j’ai reçu tous les cultes qui m’en avaient fait la demande. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris ne l’a pas fait. Mais naturellement, ma porte est ouverte. Nous avons, effectivement, beaucoup de sujets à évoquer. Par ailleurs, je réunirai prochainement le Forif, le Forum de l’islam de France.

Quel regard portez–vous sur le rôle actuel de la Grande Mosquée de Paris dont on a parfois dit qu’elle est "une ambassade bis" d’Alger à Paris ?

Dans l’islam en France, l’islam consulaire n’a pas droit de cité. Il ne faut pas confondre les rôles. La diplomatie, ce sont les ambassades ; les lieux de culte, c’est la religion. Point final. J’assume par ailleurs que dans le combat contre l’islamisme politique, la Grande Mosquée a pris sa part, en participant à la charte de l’islam de France qui promeut la liberté de conscience.

On entend parfois qu’un conflit avec l’Algérie pourrait entraîner des déstabilisations en banlieue. Selon vos informations, qu’en est–il ?

Il y a des prudences qui sonnent comme des renoncements. Ce que vous évoquez renvoie à la question de l’assimilation, dont nous venons de parler. Certains faits relativisent ce que vous dites : l’extrême gauche n’a, par exemple, pas réussi à entraîner les banlieues dans les manifestations propalestiniennes. Je ne me résignerai jamais à l’idée que des Français, d’où qu’ils viennent, s’en prennent à la France.

https://www.lopinion.fr/politique/signalement–a–la–procureure–premiere–reaction–de–bruno–retailleau–la–grande–mosquee–de–paris–dans–la–tourmente–apres–les–revelations–sur–la–certification–halal

Signalement à la procureure, première réaction de Bruno Retailleau… la Grande Mosquée de Paris dans la tourmente après les révélations de l’Opinion sur la certification halal

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Dès lundi soir, peu après la publication de notre enquête, le député RN de la Somme Matthias Renault a réalisé un signalement sur la base de l’article 40

Publié le 21 janvier 2025 à 18:31 – Maj 21 janvier 2025 à 18:50

Antoine Oberdorff

La Grande Mosquée de Paris  –  Sipa Press

Toujours en visite officielle à La Mecque en Arabie Saoudite, le recteur Chems–Eddine Hafiz est visé par de nombreuses accusations à la suite des informations de l’Opinion sur les activités de certification halal de la Grande Mosquée de Paris et les millions d’euros que permet d’engranger ce monopole décidé par l’Algérie, fin 2022.

Au lendemain des révélations de l’Opinion sur la Grande Mosquée de Paris (GMP), le député RN de la Somme, Matthias Renault, a pris la plume pour adresser un signalement à la procureure de la République de Paris, Laure Beccuau, sur le fondement de l’article 40 du Code de procédure pénale.

Comme d’autres élus, il se demande comment, par une simple décision du pouvoir algérien, la Grande Mosquée de Paris a pu se voir octroyer un monopole sur la délivrance de certifications halal pour l’intégralité des produits de l’Union européenne exportés vers l’Algérie. « La certification étant payante, le système ainsi mis en place, obligatoire pour l’export, s’apparente à un droit de douane entravant la concurrence », écrit l'élu lepéniste, fraîchement élu à la tête du groupe d’amitié entre la France et le Maroc à l’Assemblée nationale. Il estime qu’un tel montage financier pourrait relever de « l’extorsion » au sens de l’article 312–1 du Code pénal.

Alors que le gouvernement algérien, lié à la Grande Mosquée de Paris, multiplie les menaces et les actes d’hostilité envers la France, l’existence de ce financement est également un enjeu de sécurité préoccupant.

François–Xavier Bellamy

« Enjeu de sécurité ». Même stupéfaction au niveau du Parlement européen, où l’eurodéputé François–Xavier Bellamy (LR) a envoyé une question écrite à la Commission européenne, ce mardi 21 janvier. « Ce monopole d’une entreprise privée est d’évidence totalement injustifiable au regard du droit européen. La tarification imposée permet d’estimer un coût de plusieurs millions d’euros annuels pour les agriculteurs et l’industrie européenne. Sans aucune valeur ajoutée ni même acte réel de certification, ce prélèvement devient une rente disponible sans contrôle. Alors que le gouvernement algérien, lié à la Grande Mosquée de Paris, multiplie les menaces et les actes d’hostilité envers la France, l’existence de ce financement est également un enjeu de sécurité préoccupant », s’alarme le parlementaire.

Dans le petit monde de l’islam en France, c’est moins l’existence d’un tel monopole sur le halal qui a suscité l’étonnement que l’ampleur des montants rapportés par l’Opinion — plusieurs millions d’euros de chiffre d’affaires déclaré pour 2023 et 2024. Et des sommes encore nettement supérieures si l’on se fie aux volumes de marchandises exportés vers l’Algérie.

« Financement du culte ». De quoi semer le doute sur l’utilisation et le fléchage de ces fonds par l’influent recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems–Eddine Hafiz, associé unique de la société « Grande Mosquée de Paris – Certification Halal » depuis le dépôt de ses statuts, le 29 décembre 2022. « L’avocaillon de la Grande Mosquée de Paris va avoir besoin d’avocats chevronnés. Tout le monde savait et chacun fermait les yeux tout en multipliant les discours creux sur la laïci–té », s’indigne l’un des opposants les plus actifs à l’actuel recteur franco–algérien.

Les données collectées par l’Opinion auprès de l’administration fiscale sont, semble–t–il, parvenues jusqu’aux services du ministère de l’Intérieur. Interrogé par nos confrères de l’Express sur le fondement d’un tel privilège, Bruno Retailleau répond que, de son point de vue, « le sujet ne touche pas aux règles de laïcité, mais aux règles commerciales ». En conséquence, l’affaire tombe dans l’escarcelle de Bercy, plus que dans celle de la place Beauvau. Toutefois, l’ex–sénateur LR considère que « la transparence doit être totale sur le financement du culte musulman, tout comme elle doit l’être sur les produits proposés aux Français ».

L’occasion aussi, pour Bruno Retailleau, de réagir aux reproches formulés par le recteur Chems–Eddine Hafiz dans un entretien à lire dans l’Opinion, où il regrette notamment qu’aucune rencontre n’ait eu lieu avec le ministre de l’Intérieur depuis sa nomination par Michel Barnier, en septembre 2024. « Depuis qu’il est ministre de l’Intérieur, il fait mine que la Grande mosquée de Paris n’existe pas, alors qu’il a reçu le grand rabbin et le président de la fédération protestante de France », s’est–il explicitement plaint. Ce à quoi Bruno Retailleau rétorque à l’Express qu’il « a reçu tous les cultes qui lui en avaient fait la demande ». Si le recteur de la Grande Mosquée de Paris ne l’a pas fait, le Vendéen précise que « naturellement, sa porte est ouverte ».

Les Algériens ont toujours considéré qu’ils étaient les primus inter parus dans la représentation de l’islam de France au regard de leur histoire. Or, la Grande Mosquée de Paris est un rouage essentiel de l’Etat algérien et un relais actif de son combat contre les Marocains.

Didier Leschi

« Islam consulaire ». Parmi les dossiers épineux dont Bruno Retailleau voudra probablement se saisir lors de sa potentielle rencontre avec Chems–Eddine Hafiz, il y a le statut même de la Grande Mosquée de Paris, régulièrement présentée comme une « ambassade bis de l’Algérie à Paris » — a fortiori depuis que l’ambassadeur Saïd Moussi a été rappelé par le président Abdelmadjid Tebboune en juillet 2024. « Dans l’islam en France, l’islam consulaire n’a pas droit de cité. Il ne faut pas confondre les rôles, considère Bruno Retailleau. La diplomatie, ce sont les ambassades, les lieux de culte, c’est la religion. Point final ».

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Bien qu’il assure n’avoir « jamais pris ses ordres » auprès de la présidence algérienne, Chems–Eddine Hafiz a piloté depuis la Grande Mosquée de Paris le comité de soutien à la réélection d’Abdelmadjid Tebboune au cours de l’été 2024. Voir la vocation première d’un lieu de culte détourner au profit d’intérêts électoraux a généré un malaise croissant parmi les habitués de l’office de la mosquée et par–delà, au sein de la communauté musulmane.

« Les Algériens ont toujours considéré qu’ils étaient les primus inter parus dans la représentation de l’islam de France au regard de leur histoire. Or, la Grande Mosquée de Paris est un rouage essentiel de l’Etat algérien et un relais actif de son combat contre les Marocains », explique Didier Leschi, auteur de Misères de l’Islam de France réédité en 2020.

« Ponts d’or ». Mardi 21 janvier, de nombreuses interrogations portent aussi sur la légitimité des réseaux de financement dont bénéficie la Grande Mosquée de Paris. Et pour cause, les experts du secteur sont formels : impossible d’imaginer qu’un tel monopole sur les certifications halal ait pu être accordé par Alger dans le dos du gouvernement français.

La signature, c’est juste après le voyage d’Etat d’Emmanuel Macron à Alger en août 2022 et avant la rupture avec l’Algérie suite à l’alignement sur les thèses marocaines sur le Sahara.

Benjamin Stora

« La signature, c’est juste après le voyage d’Etat d’Emmanuel Macron à Alger en août 2022 et avant la rupture avec l’Algérie suite à l’alignement sur les thèses marocaines sur le Sahara », rappelle l’historien Benjamin Stora, tout en reconnaissant qu’il « ne sait pas si cette modalité pourrait être prise aujourd’hui » compte tenu de la dégradation des relations entre la France et l’Algérie.

Las du « double discours » tenu par l’Etat français sur la lutte contre les ingérences étrangères, un fin connaisseur de la Grande Mosquée de Paris se félicite que les lignes bougent enfin, sous couvert d’anonymat : « Hafiz a une activité mondaine très forte, un côté duplice et particulièrement habile. Comme il a des moyens financiers conséquents, il a fait des ponts d’or aux gens depuis son arrivée en 2020, mais le réel finit toujours par vous rattraper ».

https://www.lopinion.fr/politique/chems–eddine–hafiz–recteur–de–la–grande–mosquee–de–paris–si–javais–le–pouvoir–de–sortir–boualem–sansal–je–le–sortirais

Chems–Eddine Hafiz, recteur de la Grande mosquée de Paris : « Si j’avais le pouvoir de sortir Boualem Sansal, je le sortirais »

Souvent présenté comme l’ambassadeur officieux de l’Algérie en France, le patron de la Grande mosquée de Paris nie exercer une quelconque influence politique entre sa patrie d’origine et celle d’adoption

Publié le 20 janvier 2025 à 17:48 – Maj 20 janvier 2025 à 18:56

Antoine Oberdorff

Emmanuelle Ducros

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Chems–Eddine Hafiz  –  La Grande Mosquée de Paris

A peine franchie la porte de son bureau, mercredi 15 janvier, Chems–Eddine Hafiz, le recteur franco–algérien de la Grande mosquée de Paris, nous interpelle : « Alors comme ça, on veut se payer le recteur de la Grande mosquée de Paris. Tout le monde crie haro sur le baudet ! » Il sait qu’une enquête sur les activités de certification halal de la Grande mosquée est en cours.

Dans la tourmente, en plein cœur des tensions diplomatiques entre Paris et Alger, cet avocat de métier se confie dans un entretien à l’Opinion : l’état de ses relations avec le président Tebboune, son silence sur la détention de l’écrivain Boualem Sansal, les accusations d’antisémitisme dont il fait l’objet depuis l’attaque du Hamas… Il se livre et répond aux rumeurs de disgrâce qui se multiplient ces derniers jours et fragilisent sa position à la tête de la prestigieuse institution religieuse, notoirement proche du pouvoir algérien.

A quoi attribuez–vous la flambée d’accusations dont vous êtes la cible ces derniers jours ? Il y a notamment eu les déclarations sur CNews de Chawki Benzehra, le lanceur d’alerte qui vous présente comme « un agent d’influence du régime algérien […] au service d’une campagne de déstabilisation de la France »...

C’est un procès d’intention. A écouter mes détracteurs, je suis le pire des malfrats. Je vois très bien pourquoi ils font cela : c’est pour déstabiliser la Grande mosquée de Paris, c’est tout. Je récuse totalement, par exemple, les accusations d’avoir participé au financement de la campagne de réélection du président Tebboune. Depuis un mois et demi, l’ancien ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, me tape dessus à longueur de temps. Je ne le connais pas. Je ne l’ai jamais vu de ma vie. Quant au fameux Chawki Benzehra, il fait partie d’une organisation islamiste « Rachad » considérée comme terroriste en Algérie. Elle accueille les anciens du Front islamique de salut (FIS). J’ai fait un communiqué pour réagir à ses accusations. Immédiatement, Xavier Driencourt a dit que c’était une fatwa. Moi, je réagis et c’est une fatwa ? Ce n’est pas du racisme quand même ?

Parmi les reproches qui vous sont adressés par l’ex–ambassadeur de France à Alger, Xavier Driencourt, il y a votre mutisme sur le sort de l’écrivain franco–algérien Boualem Sansal, arrêté le 21 novembre dernier en Algérie. Pourquoi n’avoir pas bougé ?

Vous croyez que j’ai le pouvoir de sortir Boualem Sansal, moi ? Si j’avais le pouvoir de le sortir, je le sortirais. Mais si demain je parle, ça va plaire à qui ? A ceux qui sont là pour m’écouter, ou aux décideurs qui ont le pouvoir de relâcher Boualem Sansal ?Je ne suis pas là pour faire le beau, je veux être efficace. Là, ça ne sert à rien.

Je l’ai dit aux autorités françaises, j’en ai parlé avec le ministre des Affaires étrangères, Jean–Noël Barrot, et avec l’avocat de Boualem Sansal, François Zimeray. En Algérie, Boualem Sansal est considéré comme Algérien.

Si demain, je suis aussi arrêté, comme lui, il va y avoir un comité de soutien ici qui demande la sortie du recteur Hafiz ? Ils vont rigoler là–bas, ils vont dire : « Il est Algérien avant tout ».

Pour certains, je suis devenu un agent du sionisme international, voire du Mossad. Pour d’autres, je suis un véritable islamiste.

Y a–t–il un point de non–retour atteint entre la France et l’Algérie quand on voit la violence des propos des autorités algériennes qui accusent le gouvernement Bayrou « d’algérophobie » ? Vous qui vous définissez comme « un trait d’union » entre les deux pays, est–ce que vous vous en trouvez fragilisé ?

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Bien sûr. Aujourd’hui, les attaques se sont accentuées parce que tous mes détracteurs habituels les amplifient. J’en suis conscient. Je vais vous dire le fond de ma pensée : il y a beaucoup d’islamistes derrière tout ça, parce que ce sont eux qui tiennent le vrai réseau. C’est pour ça que lorsqu’il y a eu le 7 octobre en Israël, ils ont trouvé l’occasion rêvée de me taper dessus. Je suis devenu un agent du sionisme international, voire du Mossad. Pour d’autres, je suis un véritable islamiste. Des députés algériens ont même fait une pétition pour demander au président Tebboune de me déchoir de ma fonction de recteur, comme aujourd’hui, on veut me déchoir parce que je serais trop proche de l’Algérie. Quelle que soit l’action que vous menez, il y a toujours des critiques.

Comprenez–vous qu’il y ait pu avoir de l’incompréhension sur vos prises de position d’abord sur l’attaque terroriste du Hamas, puis sur le conflit à Gaza ?

Quand il y a eu le 7 octobre, je suis devenu le pire des antisémites. On m’a reproché de ne pas être allé à la marche contre l’antisémitisme, de n’avoir jamais dit que le Hamas était une organisation terroriste. Que faut–il que je fasse ? Juste avant la marche du dimanche 12 novembre 2023, je publie une tribune dans Le Monde pour affirmer que l’antisémitisme ne passe pas par les mosquées. Malheureusement, il n’y a plus de nuance possible… Quand j’ai reçu Rima Hassan, Jacques Attali m’envoie un texto : « Comment peux–tu la recevoir ? Je ne te parle plus ». Je lui ai répondu : « Moi, quand j’ai reçu Mila à la mosquée et que tu as applaudi, c’était bien, non ? » Quoique je fasse, je prends des coups.

« Quand le Président Macron m’a reçu dès mon installation, il m’a dit : “Je crois que le métier le plus dur en France, c’est celui de recteur parce que vous ne satisfaites jamais personne” »

Avez–vous le sentiment que vos jours à la tête de la Grande mosquée de Paris sont comptés ?

Depuis quinze jours, vous croyez que je dors tranquille ? Déjà à mon arrivée à la tête de la mosquée en 2020, on a mené une campagne dingue contre moi. Ça a continué quand je me suis engagé après la mort de Samuel Paty. Aujourd’hui, je serais devenu un influenceur au détriment de la France. J’ai été avocat pendant quarante ans. Si j’ai accepté les fonctions de recteur, c’est pour servir. Quand le Président Macron m’a reçu dès mon installation, il m’a dit : « Je crois que le métier le plus dur en France, c’est celui de recteur parce que vous ne satisfaites jamais personne ».

A vous entendre, vous seriez le bouc émissaire de la brouille diplomatique entre la France et l’Algérie, en payant le prix de l’alignement d’Emmanuel Macron sur les thèses marocaines...

Ce n’est pas ma faute si je suis le septième recteur d’origine algérienne. Ma fonction est compliquée parce qu’il y a des envieux à Paris, à Alger et ailleurs. Il y a même des vidéos du roi marocain Hassan II où il dit qu’on lui a volé la mosquée. C’est une des raisons de toutes les attaques dont je suis l’objet. Si vous allez sur X [ex–Twitter], actuellement, il y a toujours un petit drapeau marocain derrière les attaques qui me visent.

Est–il exact, comme le rapporte le média Maghreb Intelligence, que le président Tebboune vous a retiré sa confiance ?

Mes relations avec le président Tebboune sont excellentes ! Elles l’ont été depuis le premier jour jusqu’à maintenant. Mais ce n’est pas des relations comme vous pouvez l’imaginer.

Quand on dit que j’exerce une influence… Sur qui ? Sur quoi ? J’influence la France ? Les musulmans ?

Pardon, mais quand vous avez pris la direction du comité de réélection de M. Tebboune au motif qu’il serait le « papa de la Nation algérienne », cela paraît témoigner d’un engagement politique clair ?

Je n’ai jamais été un ambassadeur bis. Donnez–moi un seul élément où j’ai marqué l’influence du président Tebboune ici à Paris ? Jamais. Quand on dit que j’exerce une influence… Sur qui ? Sur quoi ? J’influence la France ?

Les musulmans ?

Je suis binational. Je suis né en Algérie, j’ai grandi en Algérie. J’ai choisi en mon âme et conscience de devenir Français, mais j’ai encore le droit de m’exprimer en tant que binational ! J’essaye de démontrer par A + B qu’il y a une compatibilité totale entre les deux, pas une contradiction. Je veux faire de la Grande mosquée de Paris une passerelle entre l’Algérie et la France, comme elle l’a été depuis 1926. Oui, j’ai tenté de rapprocher les deux parties. Oui, j’ai parlé aux deux chefs d’Etat.

Bruno Retailleau ne parle pas de l’islam, il parle beaucoup de l’immigration et des islamistes. Depuis qu’il est ministre de l’Intérieur, il fait mine que la Grande mosquée de Paris n’existe pas.

Avez–vous rencontré Bruno Retailleau depuis sa nomination à l’Intérieur ?

A l’Elysée, pour les vœux. Je ne l’ai pas rencontré à titre personnel. Et je peux vous dire que je m’en suis plaint en disant que ce n’est pas normal venant d’un ministre de l’Intérieur. Je suis déçu que Bruno Retailleau n’ait reçu aucun musulman. Bruno Retailleau ne parle pas de l’islam, il parle beaucoup de l’immigration et des islamistes. Depuis qu’il est ministre de l’Intérieur, il fait mine que la Grande mosquée de Paris n’existe pas, alors qu’il a reçu le grand rabbin et le président de la fédération protestante de France. Je ne dis rien, mais je prends acte.

On dit, en revanche, que vous seriez ami avec Gérald Darmanin, est–ce exact ?

Incroyable ! Quand Gérald Darmanin est arrivé, d’un coup, il est devenu algérien comme moi et c’était mon copain ! Alors que quand Moussa Darmanin était ministre de l’Intérieur chargé des cultes, il ne m’a jamais fait aucun cadeau. Comme moi, je ne lui en ai jamais fait. Il était ministre de l’Intérieur, je suis recteur de la Grande mosquée de Paris, point à la ligne.

https://www.lepelerin.com/france/politique/tensions–algerie–france–il–faut–se–montrer–patient–pour–esperer–une–reconciliation–selon–l–historien–benjamin–stora–11003

Tensions Algérie – France : « Il faut se montrer patient » pour espérer une réconciliation, selon l'historien Benjamin Stora

Vincent Bresson

Publié 21 janvier 2025 à 14h30

Les crispations croissantes entre Paris et Alger ramènent, une fois encore, à la mémoire de la guerre d’Algérie. L’historien Benjamin Stora, invite à penser la réconciliation sur le temps long.

Incarcération de l'écrivain franco–algérien Boualem Sansal, renvoi vers Paris d'un influenceur algérien expulsé pour ses appels à la violence. Pourquoi cette soudaine escalade ?

L'an dernier, Emmanuel Macron a décidé d'appuyer le plan marocain sur le Sahara occidental. Or, Alger soutient les indépendantistes de la région. Cette position a mis le feu aux poudres. Elle est venue percuter le travail mémoriel entrepris après la remise de mon rapport. L'Algérie et la France entretiennent une relation peu ordinaire sur la scène diplomatique qui explique l'apparition régulière de points de tension. Des millions de personnes sur le sol français ont un lien avec l'Algérie. Ces différends ne peuvent donc pas se résumer à une question de politique étrangère, ils ont aussi une dimension de politique intérieure.

L'Algérie cherche–t–elle réellement la réconciliation ?

Il est difficile d'estimer la position générale de la population algérienne sur toutes ces questions. Mais il ne faut pas sous–estimer la force du nationalisme local. En parallèle, il existe heureusement une réelle volonté de sortir de cette culture de guerre. Le pouvoir algérien n'a, lui, pas immédiatement saisi la main tendue ces dernières années par Emmanuel Macron. Il s'est d'abord montré silencieux, puis a mis sur pied une commission mixte d'historiens qui s'est réunie à plusieurs reprises entre 2022 et 2024. C'était un bon signal mais ce travail est aujourd'hui interrompu.

La mémoire de la guerre d'indépendance fait–elle obstacle du côté algérien ?

Elle permet de légitimer le pouvoir en place. Comme elle est même à la base de la création de l'État–nation algérien, elle est utilisée à des fins politiques. Pour les factions extrémistes, notamment islamo–conservatrices, il faudrait même que l'Algérie rompe complètement avec la France. Mais cette instrumentalisation existe aussi de l'autre côté de la Méditerranée. Reconnaître les exactions commises par la France entraîne, encore aujourd'hui, une levée de boucliers au sein d'une frange identitaire hexagonale.

Le sujet reste–t–il toujours aussi sensible dans notre pays ?

Pour les plus jeunes des Français d'Algérie (les pieds–noirs), les moments liés à la guerre d'Algérie se sont estompés. Mais pas pour les plus âgés. Les polémiques actuelles font remonter à la surface les souvenirs enfouis. L'évocation des accords d'Évian de 1962, que beaucoup considèrent toujours comme mal négociés par le général de Gaulle, continue d'animer les conversations familiales. Et puis, les regrets des occasions perdues pour construire une Algérie fraternelle reviennent dans les esprits d'autres, eux aussi nombreux. Pour tous, l'Algérie, comme pays, reste présent dans les cœurs.

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La France a–t–elle effectué le travail historique nécessaire?

Les détracteurs répètent sans cesse qu'il faut en finir avec la repentance perpétuelle. Mais il n'y en a jamais eu ! Avec l'ouverture d'archives relatives à la guerre d'Algérie et la reconnaissance de la responsabilité de la France dans la disparition de Maurice Audin, un militant du parti communiste algérien, nous démarrons à peine ce travail de mémoire. Si toutes ces avancées vont dans le bon sens, il reste beaucoup à faire. Les cimetières européens sont à l'abandon en Algérie et ils mériteraient d'être entretenus pour faire vivre cette mémoire. La France devrait aussi aider plus activement à décontaminer les sites des essais nucléaires qu'elle a menés en Algérie dans les années 1960.

Certaines voix souhaitent revenir sur l'accord de 1968 qui donne droit aux Algériens s'installant en France à un régime dérogatoire. Qu'en pensez–vous ?

Il est présenté comme une mesure facilitant l'immigration. Or ce n'est pas le cas. Il a même été pensé pour être plus restrictif que les accords d'Évian, qui garantissaient la libre circulation entre la France et l'Algérie. En 1993, le ministre de l'Intérieur, Charles Pasqua, l'a même durci en supprimant l'octroi automatique de la nationalité pour les personnes nées en Algérie française. Revenir dessus ne changerait donc rien.

Gardez–vous l'espoir d'une véritable réconciliation, alors que des centaines de milliers de personnes suivent des influenceurs hostiles à notre pays ?

Le travail de mémoire est long et permanent. La France est entrée dans une nouvelle étape de ce rapprochement. Ce n'est pas le moment de lâcher et de se replier sur soi–même. Expulser tout le monde n'est pas la seule solution, il faut dépasser la logique de l'affrontement, composer avec cette histoire commune si passionnée et se montrer patient.

https://elwatan–dz.com/le–ministre–francais–de–linterieur–multiplie–les–interventions–mediatiques–retailleau–sacharne–contre–lalgerie

Le ministre français de l’Intérieur multiplie les interventions médiatiques : Retailleau s’acharne contre l’Algérie

21 janvier 2025

Dans sa diatribe clairement anti–algérienne, le ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau, s’est appuyé sur deux  faits essentiels : le refus d’Alger d’accueillir l’influenceur «Doualemn» et les poursuites engagées par la justice algérienne contre Sansal.

Qu’est–ce qui pourrait expliquer l’agressivité de Retailleau vis–à–vis de l’Algérie ? Le ministre de l’Intérieur français, nommé à ce poste le 21 septembre 2024, ne rate, en effet, aucune occasion pour déverser son fiel contre l’Algérie au point de susciter des réactions de réprobation de la part même de personnalités politiques françaises de divers bords.

Retailleau est revenu, avant–hier, à la charge dans un contexte marqué par de fortes tensions entre Alger et Paris, attisées notamment par l’affaire de l’écrivain franco–algérien Boualem Sansal, mis en examen par la justice algérienne pour «atteinte à l’intégrité territoriale» du pays. Invité sur le plateau de BFM TV, il a ainsi souhaité la fin de l’accord franco–algérien de 1968 relatif aux conditions d’entrée en France des ressortissants algériens.

Ce n’est pas la première fois que Retailleau dénonce les termes de cet accord, au demeurant défavorable en partie aux Algériens qui se rendent en France.  En premier lieu, les étudiants algériens. Un accord qui, rappelons–le, écarte les Algériens du droit commun en matière d’immigration. «Il faut le remettre sur la table», a–t–il dit, tout en dénonçant, selon lui, «l’agressivité» d’Alger vis–à–vis de Paris. Répétant à satiété que la France avait été «humiliée», lorsque l’Algérie a refusé l’entrée sur son territoire d’un influenceur algérien expulsé de France, Retailleau ne voit aucun inconvénient à faire dans le mélange des genres.

Depuis peu, il n’hésite pas à marcher sur les platebandes de son collègue du Quai d’Orsay, Jean–Noël Barrot, butinant ici et là son fameux : «Je ne laisserai rien passer.» Ségolène Royal, ancienne ministre et conseillère de François Mitterrand, s’en est d’ailleurs dernièrement offusquée, s’interrogeant sur le rôle que s’est attribué Retailleau dans la gestion du dossier des relations algéro–françaises. «Il est ministre des Affaires étrangères ? Quand on a soutenu la loi inqualifiable sur ‘‘les bienfaits de la colonisation’’, est–on légitime pour menacer l’Algérie, afin de faire oublier le fiasco d’une expulsion claironnée avant d’être réalisée ?» s’est–elle interrogée dimanche sur son compte X (anciennement Twitter).

Et d’ajouter : «On comprend la démission du conseiller diplomatique de l’Elysée (Emmanuel   Bonne, ndlr), un diplomate professionnel respecté et expérimenté, conscient de l’effondrement de l’estime pour la France en Afrique en raison de postures arrogantes d’un autre âge.» Emmanuel Bonne a, faut–il le préciser, annoncé son départ sur fond, entre autres, de tensions avec la cellule militaire de l’Elysée, selon Le Monde.

Le quotidien  français affirme que  plusieurs «incidents» ont conduit à la démission de Bonne, parmi lesquels l’approche de la France officielle par rapport à ses relations diplomatiques avec certains pays du Sud. Dans sa diatribe clairement anti–algérienne, le ministre de l’Intérieur français s’est appuyé sur deux  faits essentiels suscitées plus haut : le refus d’Alger d’accueillir l’influenceur «Doualemn» et les poursuites engagées par la justice algérienne contre Sansal.

Fixation maladive

«L’accord  de 1968 est daté et a déformé l’immigration algérienne. Il n’a pas lieu d’être. Il faut le remettre sur la table», a–t–il poursuivi. Et d’enchaîner : «La France doit choisir des moyens de répondre à l’Algérie. On est allé au bout du bout […] je suis favorable à des mesures fortes, car sans rapport de forces, on n’y arrivera pas.»  Bruno Retailleau, proche de Philippe de Villiers, tente ainsi de se positionner encore plus à droite après avoir changé de chapelles politiques au gré des circonstances du moment.  Il fait son entrée en politique en intégrant le Mouvement pour la France (MPF), dont il devient vice–président.

En 2004, il gagne ses premières élections, devenant sénateur de la Vendée. Membre de divers groupes d’études, il travaille, entre autres, sur une mesure visant à augmenter le nombre d’entreprises de taille intermédiaire, soulignent des médias français. En 2010, il annonce qu’il quitte le MPF suite à un désaccord avec Philippe de Villiers.

Devenu président du conseil général de la Vendée, il intègre l’UMP en février 2012 et rejoint le comité de campagne de Nicolas Sarkozy. Deux ans plus tard, il remporte la primaire de l’UMP à la présidence du groupe au Sénat. L’année suivante, il participe aux élections régionales du Pays de la Loire, qu’il remporte haut la main. Lors de la présidentielle de 2017, il soutient François Fillon dès les primaires de la droite. Il reste aux côtés du candidat même pendant le scandale du Penelope Gate.

Après la défaite du candidat à l’élection présidentielle, Bruno Retailleau devient président du club politique Force républicaine, d’après ces mêmes médias. Le 2 septembre 2022, Bruno Retailleau officialise sa candidature à l’élection pour la présidence du parti Les Républicains. Il échoue au second tour du scrutin, battu avec 46,3% des voix. Suite à la nomination de Michel Barnier à Matignon, Bruno Retailleau devient ministre de l’Intérieur. Depuis, son sujet de prédilection est l’Algérie. Et il semble en faire une fixation maladive.

https://www.breizh–info.com/2025/01/21/242978/dette–algerienne–envers–les–hopitaux–francais–un–scandale–qui–pese–lourd–sur–les–relations–franco–algeriennes/

Dette algérienne envers les hôpitaux français : un scandale qui pèse lourd sur les relations franco–algériennes

Rédaction

21 janvier 2025

La dette colossale que l’Algérie a accumulée envers les hôpitaux français est bien plus qu’une simple affaire de factures impayées. Elle illustre l’irresponsabilité d’un État étranger, habitué à profiter des largesses françaises, et l’impuissance des autorités nationales à imposer le respect de leurs institutions.

Un gouffre financier ignoré par Alger

En 2023, la dette de l’Algérie envers l’Assistance publique–Hôpitaux de Paris (AP–HP) s’élève à près de 45 millions d’euros. À cela s’ajoutent les créances envers d’autres grands centres hospitaliers, tels que les Hospices civils de Lyon ou les Hôpitaux de Marseille. Cette situation, qui s’éternise depuis des années, est devenue un fardeau pour des établissements déjà en difficulté financière, comme en témoigne le déficit de 460 millions d’euros de l’AP–HP en 2024.

Les causes de cette dette sont connues : des patients algériens, souvent titulaires de visas touristiques, arrivent en France avec des pathologies lourdes, non couvertes par les assurances requises pour leur entrée sur le territoire. Sous prétexte d’un impératif humanitaire, ces patients sont soignés, mais les factures restent impayées. À cela s’ajoute le mépris affiché par des personnalités détentrices de passeports diplomatiques, qui bénéficient des meilleurs soins sans jamais régler leurs ardoises.

Une gestion désastreuse et des complicités à peine voilées

Malgré l’ampleur de cette situation, les administrations françaises semblent étrangement passives. Les chiffres précis de cette dette ne sont même plus communiqués par les institutions concernées. L’exemple de 2016, où un compromis avait permis d’effacer partiellement une dette de 20 millions d’euros, montre que la France préfère céder face à Alger plutôt que d’exiger fermement son dû.

Cette inertie est d’autant plus incompréhensible que certains témoignages rapportent l’existence de filières organisées, facilitant l’arrivée en France de patients algériens. Au–delà des failles administratives, on ne peut ignorer l’influence de cercles bien–pensants qui, sous couvert de « déontologie », contribuent à aggraver cette situation en sacrifiant l’intérêt des contribuables français.

Un enjeu politique et identitaire

Ce contentieux s’inscrit dans un contexte plus large de relations tendues entre Paris et Alger. Alors que l’Algérie refuse de collaborer sur des dossiers cruciaux comme les expulsions de clandestins ou le rapatriement de ses ressortissants indésirables, elle continue de bénéficier de privilèges exorbitants grâce à l’accord bilatéral de 1968. Ce texte, dépassé et injustifié, offre aux Algériens un traitement de faveur en matière d’immigration, d’emploi et de séjour, au détriment de l’équité républicaine.

Comme l’a récemment rappelé Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, cet accord « déforme l’immigration algérienne » et nourrit un rapport de dépendance nuisible pour la France. En effet, malgré les innombrables gestes de réconciliation de Paris, Alger persiste dans son agressivité, ne manquant pas de piétiner les intérêts français à la moindre occasion.

Face à cette situation, il est urgent que la France reprenne le contrôle. Cela passe par la remise en cause de l’accord de 1968 et par une révision complète des politiques migratoires et hospitalières. La priorité doit être donnée aux citoyens français et non à des États qui se défaussent de leurs responsabilités.

De plus, des mesures concrètes doivent être adoptées pour éviter que les hôpitaux français ne soient utilisés comme des « portes ouvertes » par des systèmes étrangers défaillants. Exiger des garanties financières avant tout soin non urgent, renforcer les contrôles à l’octroi des visas, ou encore mettre fin aux privilèges diplomatiques abusifs sont autant de pistes à explorer.

La dette algérienne envers les hôpitaux français est bien plus qu’une affaire comptable. Elle est le reflet d’une France affaiblie, serpillère, incapable de faire respecter ses lois et d’imposer ses conditions à des États qui abusent de sa générosité.

Si Paris veut préserver sa souveraineté et restaurer sa fierté, elle devra, à l’avenir, cesser de céder aux pressions d’Alger et redéfinir ses priorités en faveur de ses propres citoyens.

https://lematindalgerie.com/lettre–ouverte–a–la–france–insoumise–mefiez–vous–des–affides–du–systeme–algerien–les–neo–marsiens/

Lettre ouverte à la France Insoumise : méfiez–vous des affidés du système algérien, les néo–marsiens

La Rédaction

21 janvier 2025

Dans ce climat de haute tension politique entre le régime d’Alger et la France, nous, opposants Algériens, ne pouvons accepter et admettre qu’une poignée de bloggeurs enragés vocifèrent dans un langage infâmant sur les réseaux sociaux contre les opposants algériens, les menaçant et les traitant de traîtres, de vendus à la solde de puissances étrangères et principalement, du Maroc.

Certes, la menace est réelle mais elle n’est pas nouvelle. Ce qu’il faut préciser, est que les opposants algériens s’inscrivent dans la dynamique révolutionnaire du Hirak du 22 février 2019 dont la revendication principale est le changement du système.

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Tebboune a été imposé par l’Armée contre la volonté populaire en décembre 2019 dont le mot d’ordre du rendez–vous électoral était le « Non aux élections avec les Gangs ». L’Etat algérien, dans sa déliquescence est composé de clans, qui s’entredéchirent et s’entretuent (2).

 Le déficit de légitimité populaire du régime algérien est tel que pour survivre il joue sur la surenchère nationale et brandit le chiffon rouge d’une Algérie assiégée et attaquée de partout. Le sentiment national démesuré chez une partie des Algériens (Algérien et je suis fier), ajouté à l’inculture et l’état de déchéance dans laquelle se trouve une partie des Harragas font que celle–ci est susceptible d’être le bras brutal et aveugle du système algérien.

Restons dans l’histoire de la permanence du Hirak où les Algériens de l’intérieur sont intimidés et emprisonnés pour toute parole discordante en leur appliquant l’article 87bis du code pénal algérien (3) ; et ceux de la Diaspora qualifiés de terroristes et de traîtres ont été, et sont menacés dans leur existence.

L’auteur de ces lignes a subi une agression verbale suivie d’une menace au couteau par des défenseurs du régime le 25 mai 2024 à Bruxelles ; ce jour–là, rassemblés devant le consulat d’Algérie, la Police bruxelloises faisait tampon entre les deux Algérie (4), un individu, nous criait : la prochaine fois nous viendrons avec des armes. Plusieurs Hirakistes ont été agressés à Paris, Barcelone…. Les polices européennes le savent car des plaintes ont été déposées.

L’épée de Damoclès pèse sur tout opposant algérien. A l’intérieur et à l’extérieur. La nature du système algérien et Le profil des individus interpellés l’attestent.

Nous aurions pleinement souhaité que le sursaut du Président Macron se fasse sur les détentions arbitraires des véritables démocrates en Algérie tels Karim Tabbou et Fethi Gharas, qui depuis des décennies, luttent pour un Etat de Droit en Algérie. Ou l’exemple du Vaillant Mohammed Tadjadit, le symbole de la résistance, une icône du Hirak et de l’Algérianité (simplicité et don de soi). Rappelons à l’opinion française que L’arbitraire du système algérien n’est pas né le 16 novembre 2024. Déjà en 1966, Bachir Hadji Ali, faisait de l’Arbitraire du régime algérien l’objet d’un livre (5).

Boualem Sansal est l’enfant de ce système. Il était l’allié inconditionnel des généraux et l’écrivain qui a servi la thèse des éradicateurs (les Janviéristes (6)) en diabolisant non seulement les islamistes mais l’Islam lui–même. Lorsqu’il était confiné dans cette dimension, lui et ses livres étaient les bienvenus en Algérie.

Aux abois, le système algérien, fragilisé à l’intérieur par le Hirak populaire et les échecs diplomatiques successifs qu’il subit sur la question du Sahara occidental exploite la sensibilité nationale des Algériens pour se présenter comme le défenseur de la souveraineté territoriale. Cette fuite en avant d’un système politique, qui navigue vers les abîmes, fait de Sansal, l’allié d’hier, l’ennemi d’aujourd’hui.

Les propos de Boualem Sansal défient le bon sens et ne résistent pas à la critique

Historique, et en finalité servent le système car celui–ci trouve dans ses propos et dans ses défenseurs de l’extrême droite et les déclarations de Macron un carburant pour discréditer l’opposition (7) et justifier l’idée d’une Algérie visée selon l’Agence de presse algérienne par un lobby antialgérien et une France macro–sioniste.

Nous, opposants algériens, répondons au Président Macron, que l’emprisonnement de Boualem Sansal ne déshonore pas l’Algérie mais le système algérien et dévoile sa véritable nature : manipulateur, prédateur, oppressif et arbitraire.

Le Système n’est pas l’Algérie car il la phagocyte.

Boualem Sansal n’est pas l’Algérie non plus. Car, au lieu de servir le Hirak, il sert les pourfendeurs de la liberté. La vraie victime du système algérien et de Boualem Sansal sont les vrais démocrates algériens et le peuple en souffrance en Algérie qui à cause de la « non vie (8)» semée par le système algérien continue, au risque de sa vie,  à s’aventurer sur des barques de fortune en Méditerranée.

Qu’en est–il de la France et du peuple français ? Et de notre histoire commune ?

Le 18 mars 1962, à Evian, Krim Belkacem et Louis Joxe ont signé la fin de la guerre d’Algérie. Réunis en 1961, pour la première fois, en ce jour du 18 mars, les deux hommes ont échangé une poignée de main. Une poignée de main entre un fervent défenseur de l’Algérie française et un fervent défenseur de l’Algérie indépendante.

Beaucoup de Français d’Algérie et de France ont épousé la cause indépendantiste des Algériens et ont donné leur vie pour cet idéal de liberté.

Aimé Césaire, Frantz Fanon, Jules Roy et Jean–Paul Sartre nous ont laissés des écrits remarquables qui condamnent fermement le système colonial. Principalement, la citation de Jean–Paul Sartre, dans Situation V, qui exhortait les Français à lutter aux côtes du peuple algérien en 1955 pour délivrer à la fois les Algériens et les Français de la tyrannie coloniale, afin de bâtir une histoire nouvelle entre la France libre et l’Algérie libérée (10).

Soixante–trois ans après, avons–nous écrit cette histoire nouvelle ?

Du côté algérien, le signataire des Accords d’Evian a été banni de l’Algérie et assassiné en 1970 à Francfort par l’Algérie officielle qui a confisqué l’indépendance aux Algériens en éjectant le Gouvernement provisoire de la république algérienne et en s’accaparant le pouvoir par la force en 1962 par l’Armée des Frontières ; celle–ci a marché sur Alger en tant qu’Armée de conquête et de pouvoir.  Depuis cette date, les Algériens vivent sous le joug d’une culture militaire prédatrice, corruptrice et liberticide. Au lieu d’être gouvernée, l’Algérie est à nouveau occupée (11).

Du côté français, une Gauche qui ne s’est jamais vraiment pardonnée le fait d’avoir voté les pleins pouvoirs aux militaires en 1956 et une Extrême droite qui continue à ruminer la grandeur de l’empire colonial de l’Algérie française.

La guerre d’Algérie est–elle vraiment finie ?

Le système algérien ayant failli à bâtir un Etat de Droit et prospère, vit en exploitant la guerre de libération comme seul acquis et seule réalisation de son histoire et continue à faire de la France son ennemi éternel : nos pères ont été victorieux en 1962 en arrachant à la France une Algérie souveraine et au tour du Système maintenant d’arracher à la France une victoire symbolique en l’amenant à présenter des excuses à l’Algérie pour son expédition coloniale. 

Force est de reconnaître que les pires généraux (Bugeaud, Cavaignac, Pélissier…) qui étaient aux commandes lors des enfumades, les massacres de masse et les déportations entre 1830–1870 en Algérie sont les mêmes généraux français, qui réprimèrent le plus sanguinairement les révolutionnaires de 1848 et de 1871 en France. Les deux peuples n’ont pas échappé à la barbarie de l’Armée d’Afrique et de l’Armée versaillaise.

Lors des élections présidentielles de 2022 en France, le thème central était l’existence de la France en question et la personne qui imposa cette thématique et le rythme de la présidentielle est un natif d’Algérie, en l’occurrence, Éric Zemmour.

La peur du musulman s’est substituée à celle de l’Arabe des années 50.

En cette fin d’année 2024 et le début de l’année 2025, ce sont les Algériens du système qui s’invitent en voulant semer le désordre en France via les réseaux sociaux à l’aide d’un climat politique complotiste bien orchestré par le pouvoir d’Alger et relayé par ses propagandistes en France.

En 1962, en Algérie, nous avons eu les Marsiens, ceux qui ont endossé les habits du maquisard de la dernière heure et ont contribué à envenimer la fin de la guerre et le devenir de l’Algérie indépendante. Force est de constater, que 63 ans après l’indépendance, le vocabulaire de la guerre de libération règne en maître (Harki, Moudjahid). L’Algérie officielle et ses affidés en France que je surnommerai les Néo–martiens sont en guerre car ils s’estiment investis d’une mission sacrée : sauver l’Algérie de ses quatre ennemis

 Les opposants algériens (les Hirakistes), l’ennemi classique marocain, le lobby anti–algérien et la France Macro–sioniste.

Les néo–martiens sont de trois types.

Les premiers, les Influenceurs que je qualifierai d’idiots utiles du pouvoir d’Alger mais dangereux pour la tranquillité publique en Europe ont démontré par leur langage utilisé l’état de déchéance et de dépravation morale dans lequel se trouve ces individus. Ce niveau de langage utilisé fait écho au représentant du système, en l’occurrence Tebboune, et prouve que le système algérien a atteint une platitude telle au vu du langage utilisé que l’esprit qui est au commande ne peut être que « détraqué ».

Les seconds sont de véritables propagandistes du Système Algérien et jouissent d’une médiatisation à l’image de Mehdi Ghezzar, qui en plus d’insulter le Maroc, fut le porte– parole du candidat Tebboune à la présidentielle de 2024 en France et donne le qualifiant honorifique de moudjahid à Tebboune et de harki aux opposants et martèle l’idée que l’Algérie est visée.

J’ajouterai aussi le politicien plus que le théologien de la Mosquée de Paris, Chems Eddine Hafiz ; une Mosquée, au lieu d’être au service des Musulmans de France, plus qu’une officine c’est une filiale du régime algérien, une forme de caserne bis.

Soustraire l’Islam en France à ses obédiences maghrébine et orientale grandira l’Islam et les musulmans, et l’ensemble des français verra enfin dans l’Islam une religion de la Rationalité, de la Tolérance et d’une grande spiritualité telle que l’a vue le catholique et l’homme des Lumières Lamartine. Sans oublier, dans ce sillage le personnage au parcours sulfureux et Algérien par opportunisme, le président du Forum mondial de la diaspora algérienne, M. Zeribi (12).

La troisième catégorie est la plus significative car elle justifie le titre de mon article : les deux intéressées sont des élues de la France insoumise, Rima Hassan et Karima Khatim. Ces deux personnages parlent et engagent la crédibilité de la France insoumise.

Qualifier l’Algérie de Mecque des Révolutionnaires et de la liberté c’est de la part de Rima Hassan faire fi de la réalité. Elle est excusable en partie, car le Machrek arabe a une image fantasmée de l’Algérie. Mais par contre, l’élue Karima Khatim, franco–algérienne endosse complètement l’habit militaire du pouvoir algérien et se permet de parler au nom de tous les Algériens et les franco–algériens et leur demande de s’aligner, de s’unir et d’être solidaire avec le régime algérien (13).

La France insoumise, a fait du peuple, de la volonté populaire le crédo de sa politique et de sa philosophie.

 Nous, Franco–Algériens partageons ce crédo et avons en raison de ce principe, beaucoup d’affinités avec ce parti.

En Algérie l’image du peuple est manquante car sa volonté est bafouée. L’Algérie est notre pomme de discorde qui peut sonner le glas de notre divorce.

Karima Khatim, insoumise en France et inféodée au système d’Alger. Et quel système ? Le système algérien est antinational (14). S’il y a chasse aux Algériens ce ne sont pas les médias français qui la provoquent mais le système algérien et ses relais en France en incriminant les opposants algériens, les fidèles du Hirak populaire et pacifique.

Aucune sagesse ne peut surgir d’un pouvoir arrogant et illégitime dont la seule passion qui l’anime est sa survie, fuite en avant, maniant la langue des détraqués, il est devenu un véritable danger pour l’Algérie et la région.

Si pour André Malraux la France n’est la France que si elle se charge du destin de l’Humanité, force est de reconnaître que la voix de la France n’est plus audible. Si la France veut renouer et rester fidèle à sa vocation et s’enchâsser dans la Déclaration des droits de l’homme, elle n’a qu’à se solidariser avec le désir de reconnaissance des peuples. Deux peuples aspirent à l’existence et frappent à la porte de l’histoire : le peuple palestinien et le peuple algérien.

Mahmoud Senadji (Algérie du Peuple)

Notes

1–Les Marsiens surnom pour l’ensemble des Algériens qui ont regagné la résistance le 19 mars 1962. Les Néo–marsiens sont les zélotes du nationalisme. Principalement pour nombre de Franco–algériens, par pur calcul sont : plus Algérien que les Algériens et plus Français que les Français. A lire aussi cet article publié par le Matin sur ce sujet le 22 mars 2022 : 

 https://lematindalgerie.com 1962–quand–les–marsiens–deferlent

2–L’Etat algérien selon l’historien Mohammed Harbi est fondé sur le crime : l’assassinat de Abane Ramdane par ses frères d’armes en 1956. Et le crime reste une constante de ce régime. Dans les années 60–70 on institutionnalise le crime car c’est au nom de l’Etat de Boukharouba (Boumediene) qu’on tue (Medeghri, Khider, Krim Belkacem). Dans les années 80–90 on assassine les figures politiques susceptibles de rassembler les Algériens (Mecili, Hachani). Et à partir du Hirak 2019, c’est la guerre des clans. L’assassinat de Gaïd Salah le 23 décembre 2019 et de son clan : Il n’y a pas de mort naturelle avec les gangs.

 3–L’article 87 bis du Code pénal : Contribution à une histoire juridique de la répression en Algérie, Algeria–Watch, 20 mai 2024

 4–Le Hirak nous livre le visage de l’Algérie : il existe deux Algérie. Comme fut le cas durant la période coloniale où nous avions l’Algérie française et l’Algérie des indigènes, les quartiers européens et les bidonvilles des Algériens, dans l’Algérie postcoloniale, cette dichotomie persiste, nous avons l’Algérie des Généraux (le Système) et l’Algérie du peuple, Club des pins et les quartiers populaires.

 5–Bachir Hadj Ali, L’arbitraire, préface de Hocine Zahouane –introduction de Mohamed Harbi, Editions de Minuit, 1966.

 6–Les janiviéristes sont la mafia politico–financière qui a décidé l’arrêt du processus électoral de 1991 et ont plongé l’Algérie dans un marasme dont les effets se ressentent à ce jour.

 7–Bensaad Ali, Les attaques du régime algérien contre Boualem Sansal et Kamel Daoud visent à piéger l’opposition, Le Monde, 7 décembre 2024.

7 Thomas Serres, Algérie « L’Europe et la France seront complices ou solidaires » Le Monde, 19 septembre2019.

8–Dans cette « Algérie Nouvelle » en cette fin d’année 2024, 28 Harragas sont portés disparus au large de Boumerdès, et à l’aune de l’année 2025, au large de Mostaganem, une mère et ses quatre enfants ont perdu la vie, attestent que cette « Algérie Nouvelle » est une Algérie mortifère.

 9–Jean–Paul Sartre, Situation V, Colonialisme et néo–colonialisme p. 48 paru dans les Temps Modernes, n°123,1956, intervention dans un Meeting « pour la paix en Algérie ».  

 10–Le 5 juillet 2019, pour la deuxième fois dans son histoire contemporaine, au plein centre d’Alger, le peuple a scandé « le peuple veut l’Indépendance ».

 (12) Bensaad Ali, De quoi l’auto–proclamé « Forum mondial de la diaspora algérienne » est–il le nom ? Médiapart, 6 juin 2024

 (13) Voir l’Appel de la Fédération franco–algérienne dont elle est la Présidente : Appel à l’unité et à la solidarité de tous les Algériens, du 8 janvier2024 ;

 (14) Mouloud Hamrouche, le système algérien est antinational, El Watan, le 4 septembre2019 ;

https://www.lepoint.fr/societe/sous–les–radars–ces–influenceurs–pro–alger–propagent–la–haine–sur–tiktok–21–01–2025–2580423_23.php#11

Comment ces influenceurs pro–Alger mettent le feu aux réseaux sociaux

Bartolomé Simon

21 janvier 2025

Zazou Youssef, Imad Tintin, Doualemn, Laksas06… Derrière ces pseudonymes enfantins, de vrais discours de haine. Ces « influenceurs » interpellés début janvier sont les relais zélés d'un pouvoir algérien aux abois. À bout de souffle, avec une économie en berne et un taux de chômage écrasant chez les jeunes, le régime des généraux tente de mobiliser grâce au sentiment antifrançais.

Pour cela, il rêve de séduire la diaspora algérienne, 5 millions de citoyens ou résidents français qui auraient un lien de parenté avec l'Algérie. Dès 2021, l'ex–ambassadeur algérien Mohamed Antar Daoud y voyait un « levier de commande non seulement dans la politique algérienne, mais (aussi) au niveau de la politique française ».

Seul hic : la diaspora, loin d'être uniforme, se sent peu concernée par les enjeux de pouvoir à Alger. Seuls 3 à 4 % d'Algériens auraient voté en France à la présidentielle algérienne de 2024. Aucune vedette franco–algérienne (Isabelle Adjani, Zidane, Kad Merad…) ne s'est jamais mobilisée pour Alger. Et, lors du Hirak, mouvement pour les droits civiques de 2019, les Algériens de France ont surtout manifesté contre le régime…

Afin de changer cela, ses dirigeants semblent s'inspirer des méthodes qui ont permis au président turc Erdogan d'assurer le contrôle des communautés hors de ses frontières, grâce à des réseaux de provocateurs. Ainsi, les relais du régime algérien agitent le chiffon rouge de l'« extrême droite » qui menacerait les Franco–Algériens et missionnent sur les réseaux sociaux des influenceurs favorables au régime. Trouver des tiktokeurs virulents n'est pas bien difficile. « Ce n'est pas une armée de l'ombre, note une observatrice à Alger, mais le résultat d'un pseudo–patriotisme sur la défensive. »

Des « moudjahidines 2.0 luttant contre le « harkisme 2.0 »

Les personnalités sur qui Alger peut compter pour ce lobbying intense sont des figures de troisième rang, tel Mehdi Ghezzar. Ce touche–à–tout (immobilier, automobile, luxe…), repéré pour sa gouaille par la radio RMC, acquiert un rond de serviette aux Grandes Gueules en 2021. Une notoriété sur laquelle il s'appuie pour revendiquer une influence sur la diaspora algérienne. Mais, à trop vouloir donner de gages de fidélité, il finit par se brûler les ailes. RMC le débarque à l'été 2024 après des propos insultants sur les Marocains tenus à la télé algérienne. « Ces intermédiaires font preuve d'excès de zèle en faveur du régime », estime Abdou Semmar, journaliste algérien d'opposition.

Ghezzar n'a pas abdiqué. Fin novembre 2024, il réunit dans un restaurant parisien une dizaine d'influenceurs franco–algériens. Parmi eux, Jhon Rachid (1,3 million d'abonnés sur YouTube), Coachlarage (65 000 sur TikTok) ou Ilyesse Benyoub (80 000 sur Instagram). La rencontre est filmée. Ghezzar les exhorte à « promouvoir l'Algérie », drapeau au mur.

Ghezzar a qualifié ces influenceurs de « moudjahidines 2.0 » luttant contre le « harkisme 2.0 ». « Vous êtes des ambassadeurs de l'Algérie », les flatte–t–il ce jour–là, se déclarant « libre et indépendant ».Indépendant, vraiment ? À l'été 2024, l'entrepreneur – qui n'a pas répondu aux questions du Point – dirigeait la campagne d'Abdelmajid Tebboune en France, avec l'aide de sa femme, la journaliste Hana Ghezzar Bouakkaz. C'est elle qui a reçu en juillet 2024 Rima Hassan à Alger, « Mecque des révolutionnaires et de la liberté », selon la députée LFI…

Un chroniqueur sur CNews, une ex–sénatrice PS, une élue LFI…

Dans un style similaire, Karim Zéribi, chroniqueur sur CNews, cherche lui aussi à « rassembler les Algériens de France ».

En vain. Alors que le régime emprisonnait Boualem Sansal, l'entrepreneur franco–algérien a accusé l'écrivain d'être « islamophobe ».

Ex–conseiller de Jean–Pierre Chevènement, devenu macroniste puis élu eurodéputé EELV, condamné en appel en 2021 à trois ans de prison avec sursis et cinq ans d'inéligibilité pour abus de biens sociaux, Zéribi a lancé début 2024 un Conseil mondial de la diaspora algérienne, intitulé pompeux pour une influence confidentielle.

Un organe « en aucun cas financé par les autorités françaises ou algériennes », assure Zéribi. « Me définir comme un relais du pouvoir algérien est totalement ridicule et diffamatoire », se défend–il, pointant une « extrême droite française hystérique sur cette affaire ».

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Dans son réseau apparaît la maire adjointe de Marseille Samia Ghali. L'ex–sénatrice PS a facilité la location de la salle du meeting phocéen d'Abdelmajid Tebboune fin août 2024. Elle assume : « Oui, je soutiens Tebboune, l'Algérie n'est pas une dictature. Et ce n'est pas illégal ! » En Île–de–France, ce dernier s'appuyait sur une élue LFI du Blanc–Mesnil, Karima Khatim, présidente de l'association Amitié franco–algérienne.

Ressentiment anti–français et discours victimaires

Dans un style plus rugueux, Alger peut compter sur Sofia Benlemmane. Cette simple « supportrice » de l'équipe de foot d'Algérie vilipende la France et le Maroc dans des lives décousus et injurieux. Suivie par plus de 300 000 tiktokeurs, elle sera jugée en mars pour provocation à commettre un crime ou un délit, menaces de mort et injure publique. Elle avait proféré des insultes sur Internet : « Je t'enc…, sale pédé, sale athée, nique ta mère toi et ta France… » Benlemmane avait déjà fait parler d'elle en 2001 : à 19 ans, elle avait investi, brandissant un drapeau algérien, la pelouse du Stade de France, lors d'un match de football France–Algérie.

« Quand vous êtes la première force migratoire dans un pays étranger, vous avez une influence certaine, assurait Mehdi Ghezzar au média algérien TSA en 2024. La diaspora algérienne, depuis trois ans, s'organise. » En fait, la manœuvre du régime algérien semble limpide : souder la diaspora derrière lui via un nationalisme mâtiné d'un ressentiment anti–français et de discours victimaires.

https://www.tsa–algerie.com/guerre–dalgerie–les–confessions–de–la–fille–dun–tortionnaire–francais/

Guerre d’Algérie : les confessions de la fille d’un tortionnaire français

Société Par: Ali Idir 21 Janv. 2025 à 08:45

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Image via Facebook

Isabelle VAHA

La grande histoire franco–algérienne est faite de petites histoires, souvent douloureuses. La grande réconciliation peut aussi être bâtie sur de petites confessions.

Celle d’Isabelle Vaha est retentissante. Fille d’un légionnaire de l’armée française qui a servi pendant la guerre d’Algérie, elle vient d’effectuer une visite dans le pays auquel son père « a fait du mal ». Elle a multiplié les témoignages pendant ses rencontres avec la presse et la société civile en Algérie.

Le témoignage glaçant de la fille d’un tortionnaire français, sur la torture pendant la guerre d’Algérie

Isabelle Vaha, 68 ans, est venue « reverser un morceau d’histoire » et partager un combat qu’elle mène depuis 40 ans. À l’université d’Alger où elle a donné une conférence la semaine passée, l’autrice de la Petite fille de Mostaganem a déclaré : « Il faut arrêter de dire que le colonialisme a des bienfaits ».

Son voyage en Algérie est aussi un clin d’oeil à l’actualité et aux débats passionnés que suscite encore la guerre d’Algérie chez certaines franges de la société française, parmi l’extrême–droite et les nostalgiques de l’Algérie française.

"Vous vous rendez compte, la fille d’un légionnaire qui a commis des atrocités pendant son passage ici dans votre pays, qui les a légitimés, qui les a re–confirmés, qui est mort avec le regret de n’avoir pas assez massacré d’Algériens", dit–elle devant les journalistes, venus nombreux l’écouter à Alger.

Son père était un tortionnaire doublé d’un raciste. La famille d’Isabelle était installée en Algérie, mais sa mère a déménagé en France juste avant sa naissance, en pleine guerre d’Algérie, pour que sa fille ne baisse pas « au milieu des Arabes ». Le racisme est assumé dans cette famille dont le père a torturé en Algérie où il a servi dans la légion étrangère. 

Isabelle Vaha a découvert cela à 8 ans, tout à fait par hasard, lorsqu’elle est tombée sur de vieilles photos de son père, le montrant en train de torturer des résistants algériens, non sans plaisir, comme le montre son sourire.

Dans la boîte, il y avait des photos d’Algérie et d’Indochine, les deux guerres que son père a menées avec l’armée française. La fillette est évidemment choquée.

Isabelle Vaha, fille d’un tortionnaire pendant la guerre d’Algérie, raconte

« Je comprends que mon père est quelqu’un d’horrible, lorsque je vois les photos sur lesquelles il pose avec fierté à côté de cadavres de gens torturés », racontait–elle en octobre dernier à Radio–France.

Adolescente, elle a osé aborder le sujet. Sa famille a nié en bloc. Le bac en poche, Isabelle s’en va, coupant définitivement avec cette famille. Elle n’en pouvait plus.

Un jour, raconte–t–elle dans une lettre posthume à son père écrite et publiée en 2002, elle prononça le prénom Mohamed à table, et le père s’écria : « Dire que je les ai balancés du haut des hélicoptères, et voilà que ma propre fille s’occupe de leurs enfants ! ».

Adulte, elle est devenue historienne et écrivaine. Dans ses écrits, Isabelle Vaha condamne sans équivoque le passé de la France en Algérie, en commençant par celui de sa famille, de son père.

Elle participe aussi régulièrement aux commémorations des faits marquants de la guerre de libération nationale comme les massacres du 17 octobre 1961 à Paris.

"Ma place est là. Je dois être là compte tenu de ce que je porte derrière moi », disait–elle. Ses actions lui ont valu d’être décorée par les autorités algériennes. 

A 67 ans, elle poursuit le combat de la vérité avec le même aplomb. « Si on attaque cette histoire algérienne de la façon dont on voudrait l’attaquer, je crois que je serai capable de sortir les griffes », dit–elle lors de son point de presse à Alger, où elle espère revenir.

En tout cas, elle repart « confirmée » et « consolidée ». Tout en reconnaissant que ce ne sera pas facile à son retour en France. Sans citer personne, on devine qu’elle s’attend à des attaques de l’extrême–droite.

Si elle n’utilise pas le mot « très fort » de « représailles », elle dit qu’elle est consciente qu’ « il va se passer quand même quelque chose ». « Je réaffirme mes discours, je réaffirme ce que je défends depuis 40 ans », assure–t–elle toutefois.

En attendant d’arriver à la reconnaissance à plus grande échelle, celle de l’Etat Français, de ce passé sombre, elle a déjà réalisé quelque chose de fabuleux, à titre personnel.

"Aujourd’hui, j’ai guéri de la culpabilité que je portais en étant la fille de celui qui a torturé et qui a fait du mal à l’Algérie », disait–elle en octobre dernier.

https://www.pressegauche.org/Sur–la–critique–de–la–pensee–decoloniale

Sur la critique de la pensée décoloniale

mardi 21 janvier 2025 / DE : Jean–Marie Harribey

Sur la critique de la pensée décoloniale

Auteur : entreleslignesentrelesmots

Depuis le début du XXIe siècle, les thèses décoloniales, nées en Amérique latine, ont gagné les centres de recherche et universitaires des États–Unis, puis les européens et notamment français.

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« Seriez–vous content de trouver un peuple de tempérament aussi barbare, qu’explosant en atroce violence il ne vous donnerait pas d’abri, vous mettrait le couteau sous la gorge, vous mépriserait comme des chiens et comme si Dieu ne vous avait pas aussi créés, comme si vous n’aviez pas le droit de demander de l’aide, que penseriez–vous d’être ainsi traités ? Ceci est le cas de l’étranger et cela votre gigantesque inhumanité. » William Shakespeare et co–auteurs, Sir Thomas Moore, 1595

Depuis le début du XXIe siècle, les thèses décoloniales, nées en Amérique latine, ont gagné les centres de recherche et universitaires des États–Unis, puis les européens et notamment français. Moins connus cependant en France, les auteurs sud–américains, hispanophones ou lusophones, fondateurs du courant décolonial sont peu à peu découverts et même pour certains traduits, notamment : Anibal Quijano, Enrique Dussel, Walter Mignolo, fondateurs du groupe Modernité/Colonialité », et Ramon Grosfoguel [1].

La problématique principale de ce courant est de défaire l’hégémonie politique et culturelle que le monde occidental a construite au détriment des peuples colonisés depuis 1492, considérée comme la date–clé du démarrage du capitalisme, indissolublement lié au colonialisme et au racisme, et donc à la négation et l’éradication des cultures autres. Le décolonialisme se distingue des pensées anticolonialistes et antiimpérialistes liées aux mouvements de libération au XXe siècle, et aussi de celles dites postcoloniales en réaction aux nouvelles formes de domination après les luttes d’indépendance en Inde, en Afrique, au Moyen–Orient et en Australie [2], parce qu’il va faire de la critique de la Modernité d’origine européenne le pivot de sa dénonciation.

Un temps confinée aux cercles universitaires et aux débats traversant les sciences sociales, la problématique décoloniale trouve maintenant un écho médiatique parce qu’elle peut se décliner en plusieurs thématiques. L’une d’elles est particulièrement traitée, l’écologie décoloniale, à laquelle le chercheur Malcom Ferdinand [3] a travaillé en France. Et la revue Socialter vient de publier un numéro centré sur l’écologie décoloniale [4].

Au fur et à mesure de sa diffusion en France, des critiques de la théorie décoloniale furent émises, notamment de la part d’historiens comme Pierre Vidal–Naquet, Pierre–André Taguieff, Benjamin Stora, ou de philosophes comme Jean–Loup Amselle [5]. Mais une critique radicale vient d’être publiée en français, provenant du continent latino–américain, celui–là même où est né ce courant. Sous la signature d’un Collectif, il est titré Critique de la raison décoloniale, Une contre révolution intellectuelle (Paris, Éd. L’Échappée, 2024). L’Avant–propos est signé Mikaël Faujour, et le livre rassemble les auteurs dans l’ordre suivant : Pierre Gaussens et Gaya Makaran, Daniel Inclan, Rodrigo Castro Orellana, Bryan Jacob Bonilla Avendano, Martin Cortès, et Andrea Barriga. Plutôt que de présenter chaque auteur et son chapitre [6] dans l’ordre du livre, je regroupe les principales critiques apportées à la pensée décoloniale autour de trois thèmes : la modernité ; l’essentialisation des colonisés et des colonisateurs ; et la méconnaissance de la logique du capital.

1. Remplacer la modernité par la colonialité ?

Dès son « Avant–propos », Mikaël Faujour dresse les grands traits de la pensée décoloniale : « la modernité serait intrinsèquement coloniale » (p. 6–7). Débutée « avec la conquête de l’Amérique, […] elle n’aurait pas pris fin avec les décolonisations de la seconde moitié du XXe siècle » (p. 7).

La raison de la poursuite de la domination est « la relation au savoir et à la connaissance fondée sur les principes d’une rationalité européenne qui condamnerait et détruirait les autres formes de connaissances et de savoirs » (p. 7). Le capitalisme est alors considéré dès sa naissance comme inséparablement colonisateur, dominateur et raciste.

La colonisation ayant été historiquement le fait de l’Europe, celle–ci est identifiée par tous les théoriciens à la modernité et comme un tout monolithique. L’économiste et sociologue Daniel Inclan parle à ce propos d’« inintelligibilité du passé » (p. 71) parce que, dit–il, « dans les formulations du tournant décolonial, il n’y a pas de place pour penser la dialectique de l’Europe dans les processus colonisateurs, l’Europe y étant au contraire présentée comme une substance maléfique qui se répand à travers le monde » (p. 61–62).

Le philosophe Rodrigo Castro Orellana ajoute deux critiques portées au penseur décolonial Walter Mignolo [7]. D’une part, aucune culture n’est homogène, il vaut mieux« parler de métissage ou d’hybridité d’un point de vue anthropologique, car un processus de subjectivation mature ne peut être fondé sur une identité autoréférentielle qui exclut le regard de l’Autre » (p. 84).

D’autre part, il n’y a pas de « privilège épistémique » des peuples colonisés pour accéder à la « vérité » de leur condition.

Dans un chapitre consacré à Ramon Grosfoguel, l’un des plus importants théoriciens du décolonialisme, le philosophe Bryan Jacob Bonilla Avendano entreprend de confronter cet auteur aux occidentaux Descartes, Hegel et Marx. Grosfoguel récuse le cogito cartésien dominateur bien que la recherche de la vérité n’appartienne pas à l’Occident. Et Avendano soutient qu’on ne peut trouver chez Hegel l’idée que seul « l’homme blanc hétérosexuel pourrait participer de la production de la conscience et de la raison » (p. 115). Inversement, tout aussi fausse est l’idée défendue par Grosfoguel « qu’il est impossible qu’un auteur écrivant depuis le « Nord » (même au sens symbolique du terme) soit lu et assimilé dans les pays du « Sud », car la théorie du Nord est toujours déjà eurocentrique et raciste » (p. 118).

Selon Avendano, la vision de la symbolique occidentale qu’ont les penseurs décoloniaux est biaisée :
« Tout se passe comme si la capacité de signifier et de symboliser une plante, un tambour ou un canoë était réservée à certaines cultures, tandis que d’autres ne laissent qu’une possibilité aux objets : devenir des marchandises. […] Que la vie soit marchandisée au cœur de la modernité capitaliste est une réalité, et il existe bien un ethos capitaliste qui cherche à dépolitiser les formes symboliques pour les remplacer par ce que Marx appelait la forme–valeur. Cependant, croire que les significations sont prédéterminées dans telle ou telle culture nous paraît dangereux, car cela finit par essentialiser non seulement les cultures non occidentales, mais quiconque ne s’inscrit pas dans une certaine logique épistémique. […] Que les objets se voient constamment donner par les individus de nouvelles significations correspondant à leur vie sociale, ce n’est pas un phénomène qui viserait uniquement les seules cultures non occidentales : c’est le fait de toutes les cultures. » (p. 130–131).

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Le philosophe Martin Cortés, dans un chapitre intitulé « Contre l’ontologie de l’origine et de la pureté, Sur Marx, les marxismes et la critique décoloniale », complète cet examen en promouvant une « déracialisation de l’humanité » (p. 138).

« Notre hypothèse sera la suivante : la tendance à éloigner Marx du cœur des démarches critiques, tendance qui se développe avec un relatif succès depuis les années 1980, paraît coïncider avec le moment où nous avons justement le plus besoin de son héritage. C’est pourquoi ce travail, bien qu’il soit en dernier ressort un essai de plus sur les façons de lire Marx en Amérique latine, s’intéresse avant tout au potentiel universel des effets de cette lecture. » (p. 140).

Clairement, comment « l’ambition universaliste du marxisme en tant qu’idéologie européenne » peut–elle saisir « les particularités de la réalité latino–américaine » (p. 150) ? C’est possible car, au sein même de l’Europe, l’hétérogénéité philosophique existe.« Parmi les évolutions du « dernier Marx », son attention se porte vers la périphérie. C’est en découvrant les luttes politiques qui se déroulent aux frontières du capitalisme développé – principalement en Irlande et en Russie – que Marx lui–même met en garde sur la nécessité de ne pas lire sa théorie comme une philosophie de l’histoire qui serait valable en tout temps et en tout lieu. » (p. 153).

L’auteur cite l’écrivain Jorge Luis Borges qui évoque « les vertus du retard » (p. 158), car « être à la périphérie n’est pas du tout un inconvénient », tandis que l’hypothèse inverse impliquerait « de placer l’Amérique latine dans une salle d’attente de l’Histoire » et serait « un drame pour la question de l’émancipation en tant que telle » (p. 158).

Dans le dernier chapitre de cet ouvrage collectif, la professeure argentine de sciences sociales, politiques et économiques Andrea Barriga consacré à « Anibal Quijano et la colonialité du pouvoir, Quand tout ce qui était solide s’en va en fumée » complète les critiques de la conception la conception de la modernité de Quijano. Loin d’être univoque ladite modernité européenne est traversée de visions très diverses :

« Il faut se souvenir qu’à partir de Kant – dont Quijano ne dit rien –, va se développer tout un éventail de théories de la connaissance très diversifiées. Pour ne parler que de certains des philosophes qui ont contribué au débat, c’est des thèses kantiennes sur la manière dont se constitue la connaissance qu’est née dans un premier temps, chez Hegel, la vision la plus aboutie de l’idéalisme, avant que des auteurs comme Nietzsche, Heidegger ou Foucault n’en fassent la critique. En parallèle, à partir des néo–kantiens et de l’École de Vienne, seront posées les bases de ce qu’on appellera le positivisme, puis, dans les premières décennies du XXe siècle, le positivisme logique. De son côté, le marxisme se défera de ces échafaudages théoriques, en menant une critique vigoureuse de l’idéalisme hégélien, et en proposant une analyse historique des rapports sociaux, où les valeurs prédominantes à chaque moment particulier de l’histoire ont pour base matérielle les relations que nouent les êtres humains les uns avec les autres. Nous voyons ainsi que le panorama est très complexe, et ne peut en rien se réduire à une « épistémè moderne eurocentrique », tout simplement parce qu’il n’existe rien de tel. » (p. 213–214).

2. L’essentialisation des colonisés et des colonisateurs

Le biais culturaliste des penseurs décoloniaux est dénoncé par tous les auteurs de cet ouvrage. Dans l’avant–propos, Faujour émet l’hypothèse que ce biais est peut–être une réaction à l’économisme du marxisme orthodoxe. Mais les décoloniaux ont alors, selon lui,« abusivement tordu le bâton dans l’autre sens, en attribuant aux discours, aux imaginaires, aux représentations, aux « épistémés », le rôle de forces motrices de l’histoire. L’attention qu’ils portent aux identités, aux spécificités cultuelles et aux « cosmovisions » les conduit à essentialiser et à idéaliser les cultures indigènes et les peuples « non blancs », dans ce qui revient à ressembler à une simple inversion de l’ethnocentrisme d’origine européenne. Cette perspective est d’autant plus problématique qu’elle s’accompagne d’une focalisation sur la « race » – catégorie éminemment ambiguë, même quand elle est manipulée par des universitaires récitant le fameux mantra « la–race–n’est–pas–une–réalité–biologique–mais–une–construction–sociale ». » (p. 14).

Dans le chapitre intitulé « Peau blanche et masques noirs » (qui inverse le titre du livre de Frantz Fanon Peau noire et masques blancs, Paris, Seuil, 1952), le sociologue Pierre Gaussens [8] et l’anthropologue Gaya Makaran entendent se livrer à une « autopsie d’une imposture intellectuelle » (p. 16). En se réclamant de Frantz Fanon, les théoriciens décoloniaux ont commis une « déformation de son legs » (p. 17). Selon Gaussens et Makaran,« Fanon établit le diagnostic suivant : les efforts du colonisé pour « récupérer » sa propre histoire, sa propre culture, sa spécificité, son langage, etc., sont une étape nécessaire dans sa lutte personnelle et collective pour la dignité et contre l’infériorisation qui lui ont été imposées par le colonisateur. Mais cette étape est insuffisante, et peut même devenir dangereuse si elle n’est pas suivie d’un dépassement de l’essentialisation ainsi que du sentiment de revanche et de supériorité ancrés dans la particularité raciale/ethnique. » (p. 19–20).

On est ici en présence de la critique majeure faite à la pensée décoloniale : l’essentialisation débouche immanquablement vers la prééminence de l’identité culturelle.

« Voilà pourquoi le parti culturaliste d’une « renaissance » est condamné à l’échec tant que la question sociale ne sera pas résolue pour le colonisé. […] Fanon nous avertit que le problème du « Noir » n’est pas le « Blanc », mais « une société capitaliste, colonialiste, accidentellement blanche », qui l’exploite, le racialise pour légitimer sa domination. » (p. 21–22).

Selon les deux auteurs, l’Europe est vue par les décoloniaux également à travers le prisme de l’essentialisation qui « repose toujours sur la transformation d’une partie de l’Europe en son tout » (p. 33), alors que « l’histoire des peuples européens a été marquée et continue d’être marquée par le colonialisme interne » (p. 34). Gaussens et Makaran pointent le fait que, au nom d’une critique du marxisme, par exemple chez Anibal Quijano,« les études décoloniales remplacent le capitalisme par la modernité, l’accumulation par le développement, la plus–value par le classisme, la classe par la race, le capital par l’Europe, la bourgeoisie par l’Occident, la subalternité par l’altérité, la conscience par l’identité, l’impérialisme par l’eurocentrisme et l’internationalisme par l’interculturalité. […] Les théories décoloniales cèdent ainsi à nouveau à une inversion stérile, sorte de « post–modernisme anti–postmoderne » qui ne fait que révéler les positions sociales dominantes à partir desquelles elles sont énoncées. » (p. 39–41).

L’un des concepts qui fait débat aujourd’hui dans l’anthropologie est celui de « nature » parce qu’il est au cœur de la question écologique. Par exemple, pour l’anthropologue Philippe Descola, « la nature n’existe pas » [9], sauf dans la culture occidentale. Et Avendano note que, pour Grosfoguel, « la notion de nature est en soi eurocentrique, occidentalocentrique, anthropocentrique. » (p. 128). Aussi, il lui rétorque :« Mais alors (question à laquelle ne répond pas l’auteur), si le mot « nature » n’existe pas dans d’autres cosmogonies, comment les subjectivités sont–elles définies dans ces « autres cultures » ? Si le cœur du problème tient au fait que l’anthropocentrisme a créé un sujet qui s’oppose à la nature pour faire de celle–ci un moyen conforme à certaines fins, cela n’implique pas pour autant que toutes les subjectivités occidentales aient une forme identique. Cela n’implique pas non plus que l’absence du mot « nature » dans ces autres cosmogonies (il faudrait savoir lesquelles) y soit synonyme d’une absence de différenciation entre les humains et la nature. […] Si l’on tient pour vrai qu’il n’y a pas de sujet et que tout est nature, alors nous faisons face à une contradiction niant la condition humaine en tant que telle. » (p. 128–129) [10].

À l’encontre des thèses sur la colonialité, les auteurs de cet ouvrage critique préfèrent une modernité qui serait fondée sur une fécondation des cultures entre elles, ce qui changerait le regard des unes sur les autres. À cet égard, Cortès prend l’exemple de l’anthropophagie :« L’anthropophagie, c’est–à–dire l’absorption de l’ennemi, était ainsi érigée par Oswald de Andreade [11] en manière de penser la culture latino–américaine. Cet acte de dévoration était cependant très différent du mépris : dans l’anthropophagie, n’est absorbé de l’ennemi que ce qui est utile, le reste est éliminé » (p. 163).

Et il cite ce poète brésilien :« Nous voulons la Révolution caraïbe. Plus grande que la Révolution française. L’unification de toutes les révoltes efficaces dans le sens de l’homme. Sans nous, l’Europe n’aurait même pas sa propre Déclaration des droits de l’homme. » (p. 163).

3. La méconnaissance de la logique du capital

Dès le début de ce livre critique, Mikaël Faujour donne le ton en citant le propos en 1978 du théoricien révolutionnaire franco–nicaraguayen Raphaël Pallais, proche des idées situationnistes :
« De tous les pouvoirs coloniaux qui ont existé dans l’histoire, le plus grand de tous est le capital. Aucune conquête romaine, aucun empire inca, rien dans le passé de l’humanité ne peut se comparer favorablement avec sa conquête impérialiste de la totalité de la planète ni avec cette insatiable passion de pénétration qui le pousse, au–delà de la Terre même, vers les espaces de la stratosphère et les planètes inconnues. » (p. 15) [12].

On l’a déjà dit, l’une des pierres d’achoppement entre les décoloniaux et leurs critiques porte sur la naissance du capitalisme qui serait intrinsèquement corrélée avec le colonialisme et le racisme. Dans le dernier chapitre de cet ouvrage collectif, Andrea Barriga raconte que, d’abord séduite par le courant de pensée décolonial, elle en fut ensuite complètement désenchantée dès qu’elle creusa le concept de colonialité forgé par Quijano.

« La nouveauté semblait résider dans le fait de prendre en compte la classification raciale dans le cadre de la formation des rapports de pouvoir dans les sociétés actuelles, ainsi que le fait que la discrimination raciale ne s’était pas achevée avec la fin du colonialisme économique et politique, mais qu’elle perdurait sous la forme d’un colonialisme épistémique » (p. 186).

Barriga ne conteste pas le fait de la perpétuation du colonialisme mais elle dénonce « la critique de l’ethnocentrisme européen [qui] finit par friser l’ethnocentrisme latino–américain, qu’on pourrait aussi bien appeler américanocentrisme » puisque « tout est né avec l’Amérique » (p. 188). Elle soutient que les idées et les institutions que les Européens ont introduites en Amérique étaient déjà enracinées en Europe. Et elle reproche à Quijano de mettre dans une balance les souffrances des uns et des autres et « à déterminer quels sont les peuples colonisés qui ont été le plus dépossédés, lorsque la dépossession fait référence à la part immatérielle de la culture. […] Or le domaine des valeurs et celui des sciences doivent être séparés. » (p. 189–190).

Dès lors, Barriga conteste l’idée que 1492 serait la date de naissance du concept de race alors qu’il n’a vu le jour qu’au siècle des Lumières.« Le terme « Indiens » n’est pas une « invention raciale » ; confrontés à des populations qu’ils ne connaissaient pas, les Européens les ont nommées ainsi en raison de leur situation géographique, puisque les explorateurs croyaient être arrivés en Inde. » (p. 193).

Rappelons aussi que Montesquieu, dans L’Esprit des lois (XV, 5), déconsidère par l’ironie la justification de l’esclavage des « nègres », omniprésente encore au XVIIIe siècle et il fait de même pour l’intolérance religieuse.

Barriga prend soin de préciser qu’elle « ne nie en aucun cas que les Européens arrivés en Amérique aient commis des méfaits en arguant de leur prétendue « supériorité » » (p. 195), mais « s’il est indéniable que l’arrivée des Européens sur le continent, et tout ce qui est advenu par la suite, est un processus qui a changé le monde de bien des manières, on doit garder à l’esprit qu’aucune institution, qu’aucun rapport social n’a été « inventé » à cette occasion » (p. 198).

Il s’ensuit pour l’auteure que, d’un côté « on [le décolonialisme] idéalise le passé américain en imaginant des sociétés sans conflit » (p. 201), de l’autre on sous–estime la supériorité technologique des Européens pour surévaluer « leur croyance en leur supériorité » (p. 201).

Ainsi, il y a une certaine cohérence dans la pensée décoloniale entre l’essentialisation des humains au–delà donc de leurs conditions de vie, une modernité excluant par définition les connaissances construites au dehors d’elle–même, une domination sur les colonisés qui relèverait d’un ordre culturel mis à distance, sinon détaché, de l’impératif capitaliste d’exploitation. Ce dernier point est crucial : si l’on peut facilement contester le fait que le capitalisme ait inventé l’esclavage parce celui–ci a existé bien avant lui, la discussion naît pour déterminer l’importance du rôle qu’il a joué dans l’explosion du développement capitaliste européen puis états–unien. Par exemple, Alain Bihr [13] a soutenu la thèse selon laquelle c’est par le biais de l’expansion commerciale et coloniale européenne, conduite par des marchands soutenus par les États, qu’a pu s’opérer, en Europe, la transition entre le féodalisme et le capitalisme. Et il confirme que les plantations de canne à sucre, surtout dans les Antilles, puis celles de coton, pratiquant l’esclavage à grande échelle ont eu une grande importance sur l’évolution de la colonisation : l’agriculture latifundiaire fondée sur l’exploitation d’un travail servile valorise le capital agraire et marchand favorisé par l’expansion commerciale et coloniale de l’Europe. Ainsi, la colonisation est reliée à l’accumulation primitive accomplie dans la violence, théorisée par Marx.

Au terme de cet ouvrage sans concessions sur la pensée décoloniale, on peut retenir que les thèmes soulevés portent sur la colonialité comme envers de la modernité en tant que processus culturel et politique de domination promouvant un développement des sociétés linéaire et univoque. Par rapport aux études postcoloniales, les auteurs décoloniaux privilégient la critique de la domination épistémique plutôt que celle d’ordre économique. Ils érigent la race comme critère principal de classification et tiennent celui–ci comme l’élément fondateur du capitalisme. Aussi les discussions soulevées mettent en avant les risques d’essentialisation des catégories de « Noirs » et de « Blancs », euphémisation des « gentils » et des « méchants ». Elles font état aussi des entorses faites par les décoloniaux à l’origine et à l’histoire du capitalisme ainsi qu’à sa logique d’accumulation. Elles s’écartent donc des conceptions antérieures d’anticolonialisme et même de postcolonialisme, pour lesquelles il était précieux de conserver le concept d’humanisme à vocation universelle mais dans un monde pluriel [14].

Si la plupart des critiques à l’endroit des études décoloniales nous paraissent justifiées, il n’en reste pas moins que ces études arrivent à un moment où la crise globale d’un système social à l’échelle mondiale bouscule, sinon fait voler en éclats, les catégories intellectuelles traditionnelles. Décolonialisme, gender studies, subaltern studies, déconstruction, intersectionnalité des rapports de domination… sont des catégories souvent présentées de façon caricaturale dans le débat public, mais elles doivent être prises au sérieux pour pouvoir en dépasser les apories [15]. Sur le plan politique et stratégique, les processus d’émancipation de tous les peuples sont à ce prix. Sur le plan théorique, la ligne de crête à parcourir entre une vision économiciste traditionnelle et une vision culturaliste et identitaire constitue un véritable enjeu pour situer le rapport de classes au sein d’un capitalisme global en crise.

Jean–Marie Harribey

https://blogs.mediapart.fr/jmharribey/blog/281224/sur–la–critique–de–la–pensee–decoloniale

[1] Pour une présentation des thèses décoloniales : Claude Bourguignon–Rougier, Philippe Colin et Ramon Grosfoguel (dir.), Penser l’envers obscur de la modernité, Une anthologie de la pensée décoloniale latino–américaine, Limoges, PUL, 2014 ; Philippe Colin et Lissel QuirozUne introduction aux théories critiques d’Amérique latine, Paris, Zones/La Découverte, 2023 ; Capucine Boidin, « Études décoloniales et postcoloniales dans les débats français », Cahiers des Amériques latines, 62, 2009, p. 129–140, https://doi.org/10.4000/cal.1620.
[2] L’auteur phare du tiers–mondisme annonçant la critique du postcolonialisme dans les années 1960 est Frantz Fanon, Les damnés de la terre, Paris, F. Maspero, 1961. Le livre d’Edward Saïd en 1978 L’Orientalisme, L’Orient créé par l’Occident, Paris, Seuil, 1980, est considéré comme fondateur des études postcoloniales.
[3] Malcom Ferdinand, Une écologie décoloniale, Penser l’écologie depuis le monde caribéen, Paris, Seuil, 2019 ; S’aimer la Terre, Défaire l’habiter colonial, Paris, Seuil, 2024.
[4] Socialter, « La crise écologique, un héritage colonial ? », n° 66, octobre–novembre 2024.
[5] Jean–Loup Amselle, « La pensée décoloniale en question », Esprit, décembre 2024
https://esprit.presse.fr/actualite–des–livres/jean–loup–amselle/la–pensee–decoloniale–en–question–45647.
[6] Les chapitres de se livre se présentent dans l’ordre suivant :
– Mikaël Faujour : « Avant–propos » ;
– Pierre Gaussens et Gaya Makaran : « Peau blanche et masques noirs, Autopsie d’une imposture intellectuelle » ;
– Daniel Inclan : « L’histoire d’un débat, Le problème de l’intelligibilité du passé » ;
– Ricardo Castro Orellana : « Le côté obscur de la décolonialité, anatomie d’une inflation théorique »
– Bryan Jacob Bonilla Avendano : « Critique de la colonialoté, L’eurocentrisme et l’épistémologie de Ramon Grosfoguel » ;
– Martin Cortés : « Contre l’ontologie de l’origine et de la pureté, Sur Marx, les marxismes et la critique décoloniale » ;
– Andrea Barriga : « Anibal Quijano et la colonialité du pouvoir, Quand tout ce qui était solide s’en va en fumée ».
[7] Orellana précise que ces critiques avaient été formulées par l’historien Ricardo Salvatore.
[8] On peut lire aussi de P. Gaussens, « Les études décoloniales réduisent l’Occident à un ectoplasme destructeur », Entretien avec Youness BousennaLe Monde, 26 novembre 2024.
[9] Philippe Descola, « La nature, ça n’existe pas », Reporterre, Propos recueillis par Hervé Kempf, 1er février 2020
https://reporterre.net/Philippe–Descola–La–nature–ca–n–existe–pas
voir aussi du même auteur Par–delà nature et culture, Paris, Gallimard, 2005.
[10] Pour des compléments sur le rapport société/nature, voir Jean–Marie HarribeyEn finir avec le capitalovirus, L’alternative est possible, Paris, Dunod, 2021, chapitre 4 ; et « Pourquoi le concept de capitalocène est–il l’objet de controverses théoriques et épistémologiques ? », Journées d’études d’Espaces Marx Aquitaine Bordeaux Gironde, 3 au 7 décembre 2024.
[11] Oswald de Andreade était un poète et dramaturge brésilien (1890–1954), auteur du Manifeste anthropophage (1928).
[12] Rafaël PallaisIncitation à la réfutation du Tiers Monde, Paris, Champ libre, p. 18–19. Cité par Faujour, p. 15.
[13] Alain BihrLe premier âge du capitalisme (1415–1763), L’expansion européenne, Paris, Pages 2, Syllepse, 2018. Recension dans Jean–Marie Harribey, « À la naissance du capitalisme, il y eut l’expansion commerciale et coloniale », Les Possibles, n° 19, Hiver 2019,
https://france.attac.org/nos–publications/les–possibles/numero–19–hiver–2019/debats/article/a
–la–naissance–du–capitalisme–il–y–eut–l–expansion–commerciale–et–coloniale.
[14] Voir notamment Dipesh ChakrabartyProvincialiser l’Europe, La pensée postcoloniale et la différence historique, Paris, Éd. Amsterdam, 2009.
[15] Voir le dossier « Vers la fin de la séparation société/nature ? », Les Possibles, n° 26, Hiver 2020–2021, https://france.attac.org/nos–publications/les–possibles/numero–26–hiver–2020–2021; ainsi que le dossier « Au croissement des différents rapports d’exploitation et de domination », Les Possibles, n° 32, Été 2022,
https://france.attac.org/nos–publications/les–possibles/numero–32–ete–2022 ; Catherine Bloch–London, Christiane Marty, Christine Mead, Josette Trat, Marielle Topelet, « Pour un féminisme intersectionnel et universaliste », 25 septembre 2021
https://blogs.mediapart.fr/jean–marc–b/blog/250921/pour–un–feminisme–intersectionnel–et–universaliste ; Catherine Bloch–London, Christiane Marty, Josette Trat, « Dépasser le clivage entre féminisme intersectionnel et féminisme universaliste », Les Possibles, n° 32, Été 2022, file:///Users/admin%201/Desktop/lespossibles_3246_8328.pdf ; Jean–Marie Harribey, « L’invisibiliation des classes populaires », Les Possibles, n° 38, Hiver 2024, https://harribey.u–bordeaux.fr/travaux/travail/invisibilisation–classes–populaires.pdf ; « Du travail et de l’exploitation, À propos du livre d’Emmanuel Renault », Les  Possibles, n° 39, Printemps 2024, https://harribey.u–bordeaux.fr/travaux/valeur/travail–exploitation.pdf ; « Pourquoi le concept de capitalocène est–il l’objet de controverses théoriques et épistémologiques », Journées d’études d’Espaces Marx Aquitaine Bordeaux Gironde, 3 au 7 décembre 2024, https://harribey.u–bordeaux.fr/travaux/valeur/controverses–capitalocene.pdf.

https://dnalgerie.com/franco–algeriens–service–national–macron–fait–une–demande–surprenante/

Franco–Algériens, service national : Macron fait une demande surprenante

21 janvier 2025

Emmanuel Macron, lors de ses vœux aux armées le 20 janvier, a fait une annonce surprenante concernant l’avenir du service national en France, avec des implications qui touchent notamment les jeunes franco–algériens. Alors que la France se trouve confrontée à une multiplication des périls, comme l’accélération des tensions géopolitiques exacerbées par la guerre en Ukraine, le président a exposé une nouvelle vision de l’engagement des jeunes dans les forces armées. Il a notamment plaidé pour la création d’un dispositif renforcé de volontariat destiné à soutenir les armées françaises, tout en soulignant la nécessité d’identifier et de former davantage de jeunes volontaires.

Le président français a révélé qu’il demandait au gouvernement et à l’état–major des armées de lui faire des propositions d’ici mai pour mieux repérer les jeunes, y compris les franco–algériens, intéressés par un engagement volontaire auprès de l’armée. Macron a ainsi mis l’accent sur l’importance de donner aux jeunes générations le choix de servir, sans pour autant rétablir le service national obligatoire. Un objectif qui semble marquer une rupture avec la politique précédente du Service National Universel (SNU), un projet qui semblait pourtant en bonne voie avant de se heurter à des obstacles politiques et financiers.

Le chef de l’État a exprimé le besoin urgent d’adapter les forces armées françaises face à des menaces de plus en plus pressantes. « Nous devons donner les moyens à la France de répondre aux défis de demain », a–t–il insisté, soulignant qu’un « réveil stratégique européen » était indispensable. Macron a en outre précisé que la France devait renforcer sa capacité à détecter les jeunes volontaires et à les former, afin qu’ils soient prêts à intervenir en renfort des armées, que ce soit en métropole ou ailleurs. Ce message était d’autant plus fort qu’il intervenait dans un contexte mondial où les tensions internationales, comme la guerre en Ukraine, ne semblent pas s’apaiser rapidement.

Dans ses propos, le président a également évoqué la nécessité de réformer la Journée de défense et de citoyenneté, un événement clé pour sensibiliser les jeunes à l’importance de la défense nationale. Environ 800 000 jeunes passent chaque année par cette journée, et certains d’entre eux, a–t–il précisé, pourraient être incités à se porter volontaires pour renforcer les rangs de l’armée. Macron a annoncé qu’il souhaitait que cette journée soit une occasion supplémentaire pour l’armée de repérer de potentiels candidats pour le service.

Un autre aspect important de l’annonce réside dans l’objectif de constituer une « réserve » de jeunes professionnels pour soutenir les forces armées en période de besoin. À ce titre, Macron a clairement indiqué que la France visait 210 000 militaires d’active et 80 000 réservistes d’ici 2030. Ce projet s’inscrit dans une dynamique de renforcement des capacités militaires de la France, notamment en cas de retrait progressif des États–Unis de l’Europe, comme certains analystes le prévoient avec l’éventuel retour au pouvoir de Donald Trump. Le président a insisté sur l’importance de la coopération européenne dans la défense, soulignant que l’Europe ne pouvait plus se permettre de dépendre exclusivement de l’aide américaine pour sa sécurité.

Cette annonce prend également une dimension particulière dans le contexte des relations entre la France et l’Algérie. Les jeunes franco–algériens pourraient potentiellement faire partie de cette « réserve » de volontaires, en étant appelés à servir dans les armées françaises. Ce scénario soulève de nombreuses questions sur l’intégration des jeunes issus de l’immigration dans le tissu national et leur place dans la défense du pays. L’inclusion de cette population pourrait renforcer le lien entre les deux nations, particulièrement dans un contexte de relations diplomatiques parfois tendues.

La proposition de Macron s’inscrit dans un contexte où la France cherche à anticiper les défis futurs, tout en adaptant ses capacités de défense face à un environnement mondial de plus en plus instable. En mettant l’accent sur le volontariat et la mobilisation de la jeunesse, Emmanuel Macron semble vouloir dépasser les limites du SNU, en axant sa politique de défense sur la souplesse et l’adaptabilité des ressources humaines. Cette stratégie pourrait offrir de nouvelles perspectives aux jeunes français, y compris aux jeunes franco–algériens, en leur permettant de jouer un rôle actif dans la protection du pays.

Ainsi, les annonces faites par Emmanuel Macron le 20 janvier 2025 soulignent un tournant majeur dans la politique de défense de la France. En offrant à la jeunesse la possibilité de servir et en cherchant à renforcer les effectifs militaires, le président trace les contours d’une nouvelle stratégie, alliant volontariat et réactivité face aux menaces globales. Si ce projet ne marque pas la fin définitive du service national universel, il semble bien que l’avenir de la mobilisation des jeunes dans l’armée française passe désormais par une approche plus souple et plus ouverte à l’engagement volontaire. Les jeunes franco–algériens pourraient ainsi se voir offrir une occasion unique de s’impliquer davantage dans la défense nationale, au moment où la France se prépare à relever des défis de plus en plus complexes.

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Pass Culture : entre dérives et critiques, un dispositif en quête de refonte

Alix Avril

22/01/2025 à 11:00

Le Pass Culture ne cesse de s’attirer la critique depuis sa création. Dernier scandale en date : l’exclusion du Puy du Fou des sites éligibles.

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Image d'illustration. © Jean–Marc Barrère / Hans Lucas

Pourquoi le Puy du Fou, avec son spectacle vivant plébiscité, n’est–il pas éligible, alors que des blockbusters américains captent des millions d’euros d’argent public ? a attaqué mercredi dernier Anne Sicard, élue Identité–Libertés du Val–d’Oise, devant la commission des affaires culturelles qui auditionnait Sébastien Cavalier, président exécutif de la SAS Pass Culture. Ces propos, largement relayés dans les médias, ont relancé le débat sur un outil déjà critiqué pour ses coûts démesurés et son manque d’efficacité.

Le Pass Culture, promesse phare d’Emmanuel Macron en 2017 – seule mesure marquante d’un programme culturel famélique, conçue pour séduire la jeunesse –, généralisé en 2021 avec l’ambition de démocratiser l’accès à la culture, est aujourd’hui un dispositif bureaucratique dont l’impasse est flagrante. Le concept initial ? Une enveloppe de 300 euros pour les jeunes de 18 ans, étendue en 2023 aux collégiens via une part collective. Les premières zones d’ombre ont émergé dès la phase de préfiguration (2017–2019).

Dans un rapport au vitriol publié en juillet 2023, la Cour des comptes pointait sévèrement le recours à des consultants extérieurs pour la coquette somme d’un million d’euros, sans qu’aucune documentation claire sur leurs missions ou responsabilités ne soit disponible. Dénonçant cette opacité inacceptable, l’institution demandait l’intégration de la SAS Pass Culture dans le giron public pour garantir une transparence indispensable et un contrôle rigoureux, jugés essentiels à la pérennité de l’outil.

Rallonges budgétaires

Des avertissements restés lettre morte. Un an et demi plus tard, la même Cour des comptes enfonce le clou avec un nouveau rapport accablant, fustigeant la gestion non maîtrisée et la gouvernance à réformer. Avec un budget annuel dépassant 300 millions d’euros – contre 92 millions lors de sa première année –, le Pass Culture consomme 6 % du budget du ministère de la Culture. Loin du projet initial qui prévoyait 80 % de financements privés, l’État assume aujourd’hui la quasi–totalité de la facture.

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La structure même du Pass Culture suscite des interrogations. Installée rue La Boétie, dans le cossu 8e arrondissement parisien, la SAS débourse 1,2 million d’euros de loyer annuel. En 2024, elle emploie 176 équivalents temps plein (ETP) répartis entre six directions, dont 52 postes dédiés au développement. Dépourvue de plafond d’emplois, la société a vu sa masse salariale grimper en flèche pour atteindre 11,3 millions d’euros, financée par des rallonges budgétaires récurrentes du ministère de la Culture. Face à ces dérives, plusieurs parlementaires réclament l’internalisation des activités, une solution également préconisée par la Cour des comptes pour « donner plus de lisibilité à cette politique publique, en définir les objectifs de manière non équivoque et renforcer son encadrement opérationnel ».

Le dispositif consomme 6 % du budget du ministère de la Culture

Avec 84 % des jeunes de 18 ans inscrits, le Pass Culture se targue d’un succès éclatant. Mais la Cour des comptes tempère : « Le dispositif n’a que partiellement atteint les publics éloignés de la culture, consolidant davantage les habitudes existantes qu’il ne les a transformées. » Ces habitudes, justement, soulèvent la polémique. Des dérives flagrantes, comme les 16 millions d’euros engloutis dans des « escape games », ont été relevées par la Cour des comptes.

Les mangas, les superproductions américaines comme Vaiana 2 (Disney) ou encore la dark romance – genre suscitant la controverse en raison de ses récits souvent stéréotypés et de sa glorification de relations toxiques – monopolisent les dépenses des jeunes, alors que le spectacle vivant ou les musées peinent à dépasser 2 % et 3 % des réservations respectives. Depuis 2021, après un tollé provoqué par la publication d’un classement où les mangas écrasaient tout le reste, la société Pass Culture a cessé de publier ces chiffres gênants. À la place, un vague top mensuel des références culturelles des jeunes est diffusé, sans explication claire ni classement précis. Un moyen de masquer le manque criant de diversité et de véritable enrichissement culturel ?

Anne Sicard, que nous avons interrogée après son intervention devant la commission des affaires culturelles, accuse la société Pass Culture de « mépris pour les offres locales » et de « parisianisme assumé ». « On nous parle de liberté pour les jeunes, mais quel signal envoie–t–on quand le château de Saint–Fargeau, par exemple, qui propose un spectacle historique de grande qualité, reste absent, alors que des blockbusters américains raflent la mise ? La liberté revendiquée par Sébastien Cavalier n’est qu’un prétexte pour masquer une absence totale de ligne éditoriale. On subventionne des produits que les jeunes achèteraient de toute façon, sans jamais s’intéresser à leur accès aux vraies richesses de notre patrimoine. »

16 millions d’euros ont été engloutis dans des « escape games »

Pour la députée, la logique consumériste du Pass Culture trahit sa vocation. « On ne démocratise pas la culture en amplifiant les habitudes. On la démocratise en permettant aux jeunes d’accéder à des œuvres qu’ils n’auraient pas découvertes autrement », tranche–t–elle.

Des réformes en vue pour le Pass Culture ? Rachida Dati, dans un communiqué du 19 décembre, n’y va pas par quatre chemins : « Si le dispositif rencontre un succès notable, il n’est pas l’outil de démocratisation culturelle qu’avaient à l’esprit ses initiateurs. » La ministre propose de revoir les règles : crédits modulés selon les ressources, mise en avant du spectacle vivant et une sélection plus exigeante des offres.

De son côté, Sébastien Cavalier, président exécutif du Pass, parle d’ajustements, mais reste flou : bonifications pour les jeunes modestes, révision des montants, sans rien de concret à ce jour. Le Pass Culture est sur la sellette. Miné par une gouvernance opaque et des choix éditoriaux contestables, la question reste entière : peut–on encore sauver ce dispositif coûteux et décrié ? Si oui, une refonte semble nécessaire, à moins de laisser cet outil sombrer définitivement, emportant avec lui l’ambition culturelle d’un quinquennat.

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Politique

Accords franco–algériens, le grand revirement : « Emmanuel Macron a globalement échoué en matière diplomatique »

Tandis que gauche et droite réaffirment leurs positions contraires, le centre revoit sa copie en faveur de la remise en cause des accords de 1968. Une bascule opportuniste pour coller à la volonté de la majorité des Français.

Par Victor Eyraud

Publié le 22 janvier 2025 à 16h00

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Le revirement de Gabriel Attal sur l'accord franco–algérien, dans le sillage de Bruno Retailleau, démontre que le vent électoral a tourné. © ANTONIN BURAT/LE PICTORIUM/MAXPPP|

Deux hommes que tout oppose, dans le même aéroport d’Alger à deux mois d’intervalle. Le 16 novembre 2024, Boualem Sansal, écrivain franco–algérien critique du régime d’Abdelmadjid Tebboune, est arrêté sur le tarmac et traîné en prison. Jeudi 9 janvier 2025, Boualem N., “influenceur” algérien pro–Tebboune – mieux connu sous son pseudonyme Doulaemn – résidant en France et narcotrafiquant multirécidiviste qui cumule onze ans d’emprisonnement, est renvoyé vers l’Hexagone malgré son expulsion le même jour pour ses appels au meurtre d’opposants algériens au régime de Tebboune diffusés sur TikTok.

En emprisonnant arbitrairement Boualem Sansal, « l’Algérie que nous aimons tant […] entre dans une histoire qui la déshonore », assène Emmanuel Macron devant les ambassadeurs français réunis à l’Élysée, le 6 janvier. En interdisant de territoire son ressortissant, la voilà qui « cherche à humilier la France », martèle Bruno Retailleau vendredi 10 janvier.

C’est quand même dingue tous ces gens qui changent totalement d’avis en un an, raille–t–on chez Marine Le Pen.

D’un cas isolé, le ministre de l’Intérieur fait une démonstration du rapport de force entre Paris et Alger. « Il y a deux ans, Boualem N. aurait juste eu une interdiction de réseaux sociaux, basta ! », constate un intime du ministre. L’enjeu dépasse largement “l’influenceur”. Au fond, Beauvau accorde moins d’importance à l’expulsion d’un homme – « on ne parle pas d’un terroriste ! », rappelle–t–on – qu’à obtenir la restriction du régime favorable aux Algériens définissant leurs conditions de circulation, de séjour et de travail en France régi par l’accord du 27 décembre 1968. Une semaine après sa nomination au gouvernement de Michel Barnier, le 29 septembre 2024, Retailleau affirmait sa volonté sur LCI : « Cet accord est déséquilibré, on doit avoir le courage de le mettre sur la table. » Le prétexte est désormais tout trouvé.

Ce 10 janvier, Retailleau trouve un soutien inattendu. À 18 heures, le Figaro publie sur son site une tribune de Gabriel Attal. « Face aux provocations incessantes, il faut dénoncer l’accord franco–algérien de 1968 », tonne l’ex–Premier ministre. L’idée de rebondir sur “l’affaire des influenceurs” trottait dans sa tête depuis plusieurs jours.

Opportunisme de la part du chef de Renaissance ? « Tant mieux », se réjouit un proche de Beauvau. C’est la preuve que le vent souffle en son sens. Gérald Darmanin, qui avait posé une gerbe tricolore en hommage aux « martyrs » du FLN le 8 novembre 2020, rejoint la danse. Sans surprise, le Rassemblement national et l’Union des droites pour la République (UDR) d’Éric Ciotti s’engouffrent dans la brèche.

Le 7 décembre 2023, Les Républicains, le RN et Horizons avaient voté conjointement pour la dénonciation de l’accord, en vain. Gabriel Attal et ses troupes macronistes avaient rejeté massivement la proposition. « C’est quand même dingue tous ces gens qui changent totalement d’avis en un an », raille–t–on chez Marine Le Pen. Renaissance basculant, le camp du “pour” est donc majoritaire, en théorie, à 54 %.

Les “atermoiements” de Macron et la préférence étrangère à gauche

De quoi faire les affaires de Retailleau et d’Attal. Les deux hommes, qui ont déjeuné ensemble fin décembre et projettent de remettre le couvert dans les prochaines semaines, ont trouvé un terrain d’entente régalien, forts d’échanges réguliers. Quitte à ce que d’autres, au centre, y perdent des plumes. Peu après la parution de sa tribune, l’entourage de Gabriel Attal reçoit un appel. Au bout du fil, l’équipe rapprochée de Jean–Noël Barrot l’interpelle, penaude : « Il faudrait qu’on parle du sujet sur le fond, c’est plus complexe que ça. »

Si le député des Hauts–de–Seine ne jette pas la pierre au ministre des Affaires étrangères – les deux hommes ont pris un café fin décembre et entretiennent de bonnes relations –, son texte renvoie de facto aux lacunes du Quai d’Orsay. Beaucoup, en Macronie comme ailleurs, jugent sa politique en la matière « incompréhensible et confondante ».

Les plus honnêtes expliquent, non sans crainte, qu’elle est moins la faute d’un seul homme que celle de toute une administration endoctrinée. Un élu Ensemble pour la République s’émeut même que ses amis diplomates au “Quai”, bien que « gauchistes » patentés, se disent « choqués par l’orientation idéologique pro–arabe, propalestinienne, pro–algérienne » du personnel.

Raison pour laquelle Bruno Retailleau outrepasse son champ d’action pour empiéter sur celui du domaine réservé du président de la République. C’est la goutte d’eau de trop pour Emmanuel Bonne, conseiller diplomatique d’Emmanuel Macron depuis 2019, soutien de la première heure et confident du soir, qui remet sa démission mûrement réfléchie à l’Élysée. Pour le pire ou pour le meilleur ? « Emmanuel Macron a globalement échoué en matière diplomatique, concède un “marcheur” de la première heure. Peut–être parce qu’il était mal conseillé ! »

Un élu EPR s’émeut même que ses amis diplomates au “Quai”, bien que « gauchistes » patentés, se disent « choqués par l’orientation idéologique pro–arabe, propalestinienne, pro–algérienne » du personnel.

Et ses prédécesseurs ? Voilà des décennies que le discours français concernant l’Algérie est illisible. Jacques Chirac ? « Une ligne incompréhensible », condamnent des élus de droite. Son successeur ? « Hyperdécevant », regrette un sarkozyste convaincu. François Hollande ? « Vendu au programme Terra Nova [think tank “progressiste” comme il se définit sur son site, NDLR]. »

Néanmoins, si la plupart des connaisseurs dénoncent les « atermoiements » d’Emmanuel Macron – et ne digèrent pas sa sortie sur la colonisation comme « crime contre l’humanité » durant la campagne de 2017 –, tous se félicitent de la reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, geste fort et inédit, intimement lié au dilemme algérien.

​Une « provocation » vis–à–vis d’Alger, tonne à l’Assemblée Bastien Lachaud, élu La France insoumise de la 6e circonscription de Seine–Saint–Denis. De l’art, à gauche, d’être constant dans la préférence étrangère. Les rituels de courtisanerie, les numéros de contorsion des cadres insoumis vis–à–vis du pouvoir algérien s’intensifient sans vergogne. « La Mecque des révolutionnaires et de la liberté est et restera l’Algérie », jurait ainsi l’eurodéputée Rima Hassan l’été dernier, dressant un parallèle nauséabond avec le « régime fasciste » de Tel–Aviv. C’est qu’il y a un électorat à choyer.

​Quand Alger accuse par trois fois « l’extrême droite » d’avoir fomenté “l’affaire des influenceurs” dans un communiqué du 11 janvier, les troupes mélenchoniennes reprennent en chœur ce discours, à l’image du député des Bouches–du–Rhône Sébastien Delogu, sur X, le 13 janvier : « Les nostalgiques de l’OAS sont de sortie pour cracher. » Trois jours plus tard, Jean–Luc Mélenchon s’étrangle de rage : « Nous ne voulons pas la guerre avec l’Algérie ! » Quand bien même Alger n’y a jamais mis un terme.

Les dessins du jour

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